Depuis le début de l'accident,
l'A.I.E.A. a joué le jeu de l'apaisement et le soutien aux autorités
centrales soviétiques. Cette attitude est parfaitement conforme
aux buts de l'Agence: promouvoir dans le monde l'énergie nucléaire.
Il est évident que si Tchernobyl a été une terrible
catastrophe, cela peut remettre en cause l'acceptabilité de l'énergie
nucléaire. Ce serait contraire au postulat fondateur de l'A.I.E.A.
Toute l'activité de ses experts s'est orientée vers la banalisation
de l'accident. Personne ne semble trouver anormal que ces promoteurs se
soient chargés à la fois des problèmes de sûreté
des réacteurs et de l'évaluation de l'impact sanitaire de
l'accident. Le conflit d'intérét n'a jamais été
évoqué pour l'A.I.E.A.
D'autres événements ont mis en évidence le peu de fiabilité que l'on peut accorder à cette agence dans ses évaluations. Par exemple pendant la guerre du Golfe, la capacité de l'Irak d'avoir ou de pouvoir développer un armement nucléaire fut un sujet d'inquiétude. Or, le 12 avril 1990, les inspecteurs de l'A.I.E.A., après une visite de cinq jours des installations nucléaires irakiennes, se contentèrent d'une inspection de routine. Rien d'anormal à signaler [62]. Après l'invasion du Koweit en août 1990, l'A.I.E.A. déclara qu'elle n'envisageait pas de nouvelles mesures de garantie. En principe, les inspections de l'A.I.E.A. ne concernent que les installations déclarées par les pays signataires du Traité de non prolifération (l'Irak est parmi les signataires). Quatre pays, dont la Grande-Bretagne (la France n'était pas concernée car elle n'était pas signataire du Traité) ont demandé à l'A.I.E.A. d'effectuer une visite additionnelle surprise des installations nucléaires irakiennes. Cette procédure est inscrite dans le Traité, mais l'Agence n'en a jamais fait aucune et n'a pas cru bon d'en faire une en Irak [63]. Il était pourtant évident pour beaucoup d'experts qu'il y avait des problèmes inquiétants. Après la fin de la guerre, les autorités américaines se décidèrent à intervenir. Elles utilisèrent l'Agence de Vienne comme couvertune. La C.I.A. indiquant ce qu'il fallait trouver et où, les experts de 1'A.I.E.A. découvrirent ce qui n'était finalement un secret que pour les experts. Cette affaire montre bien les limites que l'A.I.E.A. s'est toujours imposées: mettre en évidence qu'un acheteur éventuel de technologie nucléaire pouvait en profiter pour fabriquer des engins nucléaires, nuisait au commerce nucléaire et au développement international de l'énergie nucléaire. On voit par cet exemple ce qu'il faut entendre lorsque l'A.I.E.A. se dit indépendante. En octobre 1989 le gouvernement de l'U.R.S.S. demandait formellement à l'A.I.E.A. de procéder à une évaluation des concepts utilisés pour la gestion de la crise dans les territoires contaminés ainsi que de l'efficacité des mesures prises concernant la santé de la population. L'A.I.E.A. proposa d'entreprendre une réévaluation de la situation radiologique en Ukraine, Biélorussie et Russie à l'aide d'une équipe multinationale [64]. Un comité consultatif international de 21 membres fut chargé de contrôler le projet et de préparer le rapport définitif [65]. Le représentant de la France était R. Coulon du C.E.A... Le rapport final fut présenté en mai 1991 au cours d'une conférence de l'A.I.E.A. à Vienne [66]. Les rayonnements n'ont eu aucun effet sur la santé de la population, telle fut la conclusion des experts . Les représentants de la Biélorussie et de l'Ukraine qui assistaient à la conférence exprimèrent leur désaccord sur cette conclusion et critiquèrent le travail réalisé [67]. (suite)
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suite:
Dans son introduction, le rapport mentionne que le gouvernement de l'U.R.S.S. avait déjà bénéficié de l'assistance de l'O.M.S. en juin 1989. Dans ses conclusions, l'O.M.S. indiquait: "Des scientifiques qui ne sont pas bien au courant des effets du rayonnement ont attribué divers effets biologiques et de santé à l'irradiation... Attribuer ces effets au rayonnement non seulement accroît la pression psychologique dans la population et provoque des problèmes de santé causés par le stress additionnel, mais aussi sape la confiance vis-à-vis des spécialistes compétents en rayonnement." Cette critique visait les scientifiques biélorussiens et ukrainiens qui avaient pris part aux débats sur les critères d'évacuation. Le rapport de l'A.I.E.A. mentionne qu'il "n'était pas nécessaire d'entreprendre une évaluation d'ensemble totalement nouvelle de la situation ", car cela avait été déjà été fait. Il est évident que la demande du Gouvernement soviétique à l'A.I.E.A. était due au fait que les conclusions des divers experts occidentaux qui s'étaient manifestés en U.R.S.S. avaient été très mal reçues à la fois par les scientifiques des Républiques et par la population. Le rapport donne quelques précisions intéressantes. 1. En tête des conclusions générales le leitmotiv habituel: aucun trouble de santé directement lié au rayonnement, des troubles de santé significatifs non liés au rayonnement. 2. La plupart des données examinées par les experts ont été fournies par les officiels soviétiques: "les données officielles qui furent examinées n'indiquaient pas d'accroissement sensible de l'incidence des leucémies et des cancers". 3. Une curieuse constatation à propos des anomalies génétiques: les données soviétiques indiquent une mortalité infantile et périnatale relativement élevée, pour toutes les régions contaminées ou non. Cette mortalité élevée existait déjà avant l'accident et "semble en décroissance". Cette constatation n'a pas suscité la méfiance des experts envers les données médicales officielles collationnées par le pouvoir central. il n'y a pourtant pas si longtemps, les spécialistes occidentaux n'accordaient guère de crédibilité aux données statistiques soviétiques, considérées comme relevant plus de l'idéologie que d'une activité scientifique. 4. Certaines mesures furent effectuées sous le contrôle de la France (contrôle de dosimétrie et de contamination interne) par le S.C.P.R.I., dont le directeur, le Pr P. Pellerin, n'est plus guère crédible en France. 5. Les mesures prises pendant l'accident furent correctes et conformes aux directives internationales admises. Ce point est en contradiction avec ce qui a été largement développé par ailleurs: l'insouciance vis-à-vis des problèmes de sûreté, l'incompétence du personnel nucléaire, l'impréparation pour faire face à une crise, etc. 6. Les mesures prises pour protéger la population contre les effets à long terme furent "excessives". Là encore, la contradiction est flagrante avec les multiples déclarations occidentales sur l'indifférence des autorités soviétiques devant les problèmes écologiques et leurs conséquences sanitaires. Les experts estiment que c'est pour diminuer l'anxiété et les stress dans la population que les autorités prirent leurs décisions, alors que les populations étaient manifestement totalement ignorantes des effets du rayonnement sur la santé. p.3
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7. A aucun moment le rapport ne
met en doute l'application réelle des décisions prises par
le pouvoir concernant les normes pour la nourriture, comme si elles avaient
été scrupuleusement respectées alors que la bureaucratie
soviétique est habituellement présentée comme notoirement
inefficace et fonctionnant à vide.
8. "En utilisant la dose engagée pour la vie comme critère d'évacuation, il n'est pas correct de tenir compte des doses passées." Cet énoncé pose un problème de logique qui semble avoir échappé aux experts: on discute en 1991 des évacuations; il n'est pas correct de prendre en compte les doses reçues entre 1986 et 1991 puisqu'elles sont passées et qu'on ne peut rien faire pour les réduire ou en réduire les conséquences sanitaires. Mais si ces évacuations avaient été envisagées en 1986, ces doses qui maintenant sont du domaine du passé auraient été du domaine du futur et il aurait été possible de les éviter. Ainsi ce concept du "faisons table rase du passé" a deux avantages: a. il occulte la responsabilité des autorités dans le retard pris pour envisager des évacuations; b. il relaxe considérablement les critères, ce qui soulage les finances. 9. Le rapport constate que les mesures prises pour décontaminer les régions "ont été modérément efficaces", euphémisme qui permet de camoufler qu'elles ont été totalement inefficaces. 10. Le problème de la contamination de l'eau à Kiev est évoqué mais aucune précision n'est donnée. D'une façon générale, depuis 1986, il n'est pas possible d'avoir des informations sur les niveaux de contamination radioactive de l'eau à Kiev pendant les premières semaines qui suivirent l'accident. C'est pourtant un des paramètres essentiels pour établir un bilan à long terme sur une importante population urbaine dont les captages en eau potable peuvent être directement contaminés par une catastrophe nucléaire. Ce n'est certainement pas un hasard si cette donnée est systématiquement escamotée à la fois par les officiels soviétiques et par les experts occidentaux. 11. Pour les experts, les normes internationales qui sont à la base des limites de contamination acceptable pour les aliments ne doivent pas être considérées comme des normes d'intervention, mais comme des normes à utiliser pour diminuer les niveaux d'irradiation. En fonctionnement normal, ces limites n'ont guère de chance d'être atteintes et, en cas d'accident, elles ne sont pas à prendre en compte. Curieuse logique des experts. 12. Le rapport constate que les évacuations causèrent beaucoup de dégâts psychologiques. Les experts estiment qu'au lieu d'envisager des évacuations il aurait été plus bénéfique de relaxer les tolérances pour la nourriture. La situation aurait paru normale et la population aurait vécu tranquillement dans l'ignorance de tout danger pour sa santé future. Ce rapport décrit bien comment les experts occidentaux entendent gérer une catastrophe nucléaire dans leurs pays. Un bilan du désastre
(suite)
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Pour estimer l'excès de cancers mortels qui seront dus à la catastrophe de Tchernobyl, il est nécessaire tout d'abord de fixer le facteur de risque cancérigène et ensuite de connaître la dose engagée collective. En ce qui concerne le facteur de risque nous considérons deux valeurs extrêmes. La valeur minimale est celle officiellement admise par la C.I.P.R. depuis 1990: 500 cancers mortels supplémentaires pour 1 million de rem x homme de dose engagée (ou 10.000 sievert x homme). Pour la valeur haute, nous prendrons la valeur brute (sans corrections), établie à partir du suivi de mortalité des survivants japonais [69]: 1.740 cancers mortels supplémentaires pour une dose engagée de 1 million de rem x homme (intitulée ci-dessous R.E.R.F. 1987 [69]). Cette valeur n'est pas la plus élevée de toutes les estimations proposées pour le facteur de risque cancérigène. L'étude du suivi de mortalité de l'usine nucléaire de Hanford (U.S.A.) par Mancuso, Stewart et Kneale conduit à une valeur 2 à 3 fois plus élevée [70]. Ainsi ce que nous donnons ici comme valeur haute du bilan pourrait être aussi assez sous-estimée. 1. Le bilan d'après les estimations officielles de I'U.N.S.C.E.A.R.
[42]
Les réductions effectuées ne
sont pas justifiées. Tous les témoignages montrent que les
autorités n'étaient pas prêtes pour faire face à
une telle catastrophe et qu'elles n'ont pas pu mettre en place des mesures
efficaces pour protéger la population.
2. Le bilan pour les 135.000 évacués de 1986
C.I.P.R. 1990 800
La prise en compte de la contamination interne subie par cette population ne peut qu'alourdir ce bilan. 3. Le bilan pour les liquidateurs
p.4
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Pour ceux qui sont intervenus
ultérieurement, les liquidateurs, les doses reçues sont moins
fortes. Les diverses informations disponibles permettent d'évaluer
à environ 600.000 au moins le nombre de décontaminateurs
qui se sont relayés jusqu'à présent sur le site. Deux
hypothèses ont été retenues pour la dose individuelle
moyenne reçue:
- 5 rem (valeur officielle); - 25 rem (valeur plausible d'autant plus qu'il faut tenir compte de la forte contamination interne par les poussières). Avec ces deux valeurs le nombre des m0rts serait: 5 rem 25 rem C.I.P.R. 1990 1.500 7.500 R.E.R.F. 1987 5.220 26.100 Pour être complet, il faudrait aussi inclure dans le bilan l'excès de mortalité par cancer parmi ceux qui, pendant des années encore, vont intervenir sur le site. Personne parmi les officiels n'a jusqu'à présent fourni d'indications sur ce point. 4. Le bilan pour les 75 millions d'habitants d'Ukraine,
A ces bilans il faut ajouter les cancers radio-induits
dans le reste de l'U.R.S.S. et sur l'ensemble de l'hémisphère
Nord. Pour les régions très lointaines de Tchernobyl, la
contamination radioactive ainsi que la dose engagée individuelle
sont plus faibles, mais elles concernent par contre des populations beaucoup
plus importantes et le bilan est loin d'etre négligeable même
s'il est difficile à établir.
L'énergie nucléaire ou l'avènement
de la mort statistique [72]
(suite)
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Pour les autorités sanitaires, tout excès de cancers dus au rayonnement est considéré comme négligeable s'il est faible comparé aux cancers qui se développent naturellement. Ainsi, même l'évaluation haute que nous avons faite serait pour eux totalement négligeable. En effet, la mortalité par cancers naturels sera d'environ 20.000 pour les 135.000 évacués de 1986, 90.000 pour les liquidateurs, 11 millions pour les 75 millions pris en compte pour l'Ukraine, la Biélorussie et la Russie. Pour ces autorités, "négligeable" a un sens strictement social. Le fait qu'il s'agit d'individus dont la mort sera le résultat du fonctionnement catastrophique d'une installation nucléaire ne les concerne pas. Karl Morgan à propos de l'effet cancérigène des retombées des tests de bombes nucléaires écrit: "C'est comme si l'on disait à une mère dont l'enfant se meurt de cancer induit par les radiations de ne pas se faire de mauvais sang parce que 30 millions d'autres personnes dans la zone humide des U.S.A. mourront naturellement de cancers [68]." Les cancers radio-induits ne seront pas directement perçus. Un cancéreux, même s'il a été irradié, ne pourra pas dire que son cancer est dû à cette irradiation. Il n'y aura pas de preuve formelle mais une simple présomption. En toute logique, on devrait dire, par effet de corrélaire, que pour tout cancéreux même faiblement irradié il existe une présomption que son cancer a été radio-induit. Les cancers radio-induits ne relèvent pas d'un déterminisme strict. Seules des statistiques [73] très sophistiquées peuvent éventuellement les mettre en évidence, à condition que les individus aient été "correctement" fichés et qu'on puisse les retrouver à tout momentjusqu'à leur mort. Ce ne serait qu'après plus d'un demi-siècle (si l'on veut connaître les dégâts sur les descendants il faudra attendre bien plus longtemps) que l'on connaîtrait le risque que la catastrophe a fait subir aux individus. Quand on aura pris la mesure de l'ampleur du crime, victimes et coupables auront disparu... Les futurs cancéreux des territoires contaminés ne pourront pas affirmer avec une certitude absolue qu'ils sont des victimes de Tchernobyl. La catastrophe nucléaire a des effets particulièrement vicieux. Elle peut nous atteindre profondément sans pour autant qu on puisse en prendre conscience. Nous sommes réduits, dans le meilleur des cas, à une donnée statistique, propriété de l'Etat. Notre propre mort et celle de nos amis nous échappent mais pour les promoteurs de l'énergie nucléaire tout cela n 'est que fantasme et imagination en délire. Pourtant, cette mort, bien que statistique, n'en n'est pas moins réelle. Bella et Roger BELBEOCH
Septembre 1991.
p.5
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Deux lettres publiées dans
la revue britannique Nature (3 sept. 1992, vol. 359, p. 21-22) faisant
état d'une fréquence anormale de cancers de la thyroïde
apparus depuis 1986 chez les enfants en Biélorussie (Bélarus)
et qui pourraient etre dus à la catastrophe de Tchernobyl ont provoqué
des remous dans les milieux médicaux et scientifiques liés
à la radioprotection.
En ce qui concerne la cancérogénèse radioinduite, il est admis qu'après une exposition aux rayonnements ionisants les leucémies apparaissent en premier dans les 2-3 ans qui suivent l'exposition et que les cancers solides à temps de latence beaucoup plus long n'apparaissent qu'après un délai d'environ 10 ans. Il est aussi admis par les autorités officielles - mais cela est controversé - qu'une irradiation de la thyroïde par incorporation d'iode 131 est moins "efficace" pour provoquer un cancer qu'une irradiation externe. L'apparition précoce de cancers de la thyroïde avec une fréquence de 80 fois supérieure à l'incidence naturelle en Biélorussie bouscule donc ces certitudes. La publication comporte en fait deux parties: - Une lettre de médecins de Biélorussie (Bélarus) rapportant leurs observations - Une lettre de cinq médecins en mission en Biélorussie sous les auspices de l'office européen de l'organisation Mondiale de la Santé et du gouvennement suisse, confirmant les résultats. Cette procédure est inhabituelle. En somme il a fallu l'aval de scientifiques occidentaux reconnus pour que soient rendues crédibles les données rapportées par les médecins de Biélorusste. La lettre des médecins biélorusses
(suite)
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suite:
Les cancers sont essentiellement des carcinomes papillaires. Ils sont très agressifs puisque pour 55 cas il y a "invasion" des tissus voisins et que des métastases lointaines (pour certaines dans les poumons) sont trouvées dans 6 cas. Un des enfants âgé de 7 ans est décédé et 10 autres sont dans un état grave. Les auteurs indiquent que cette augmentation de la fréquence des cancers de la thyroïde chez les enfants, survenant dans les quelques années suivant l'exposition aux isotopes d'iode radioactif, bien qu'inattendue n'en est pas moins réelle. Ils soulignent que cela pose non seulement des problèmes scientifiques mais également humanitaires à la jeune République de Bélarus. [Depuis la fin d'existence de l'URSS les Républiques indépendantes ne reçoivent plus d'aide de Moscou]. Leur conclusion: "Nous pensons que la seule explication réaliste pour cette augmentation de la fréquence des cancers de la thyroïde est qu'elle est une conséquence directe de l'accident à Tchernobyl". La lettre des experts occidentaux
p.6
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Nous avons aussi examiné
les données relatives à l'incidence des cancers de la thyroïde
en Bélarus. Il y a une augmentation prononcée de leur fréquence
depuis 1990 par rapport à la moyenne observée entre 1986
et 1990. Cet accroissement [de la fréquence] a débuté
4 ans seulement après l'accident de Tchernobyl, un laps de temps
ètonnamment court comparé aux résultats des études
sur les cancers de la thyroïde résultant d'une irradiation
externe [NdT: Par exemple, données antérieures obtenues à
partir d'enfants ayant développé un cancer de la thyroïde
après avoir subi une irradiation externe pour des raisons médicales,
irradiation par rayons X du thymus, du cuir chevelu d'enfants atteints
de teigne, Gazette Nucléaire
no 71/72 , août-sept.
1986]. Parmi les enfants atteints d'un cancer de la thyroïde depuis
1990 en Bélarus, les 8 plus jeunes ont été exposés
in utero mais avaient plus de 3 mois d'âge foetal au moment
de Tchernobyl. il est connu que la thyroïde foetale commence à
concentrer l'iode à partir de la 12ème-14ème semaine
de grossesse.,
Nous pensons qu une amélioration du dépistage ne peut qu'avoir joué un rôle mineur dans l'incidence enregistrée des cancers de la thyroïde. La proportion de nodules réséqués [enlevés chirurgicalement] qui sont cancéreux est élevée et c'est un type de tumeur agressif. Le rapport entre le nombre de cancers de la thyroïde des enfants et celui des adultes a augmenté d'une façon dramatique, bien qu'il y ait actuellement des signes d'augmentation de l'incidence des cancers de la thyroïde chez des patients de plus de 15 ans. La fréquence observée excède de beaucoup l'incidence naturelle de cette maladie chez les enfants de moins de 15 ans qui est d'environ 1 cas par an par million d'enfants. Dans la région administrative de Gomel (population totale: 2,5 millions), région de Biélorussie qui a reçu les plus fortes retombées de Tchernobyl, l'incidence a été de 80 pour 1991 et les 6 premiers mois de 1992. [C'est encore actuellement une des régions les plus contarminées en Césium 137, Strontium 90 et en particules "chaudes", Gazette Nucléaireo 109/110 , juin 1991, numérisation en cours]. On admet généralement qu'une irradiation externe du cou est associée à une augmentation de l'incidence des cancers de la thyroïde chez l'homme et que la radiosensibilité de la thyroïde est plus élevée chez l'enfant. Dans quelques études animales - mais pas toutes - on a trouvé que l'irradiation externe était plus carcinogène que l'iode 131.11 n'y a pas de preuves certaines que le diagnostic par iode radioactif ou son utilisation thérapeutique comporte un risque carcinogène et l'iode 131 s'est avéré un traitement sûr et efficace dans la maladie de Graves des adultes, bien qu'il ne soit que très rarement utilisé chez de jeunes enfants. L'effet combiné du niveau élevé de rayonnement par les retombées radioactives et du nombre important de personnes exposées peu de temps après l'émission du panache ont été probablement comparables, le nombre de personnes exposées a été beaucoup plus faible de plusieurs ordres de grandeur. Dans le cas de l'accident de Windscale (maintenant Sellafield) le nombre de personnes exposées a été important mais les doses ont été plus faibles et aucune étude adéquate des effets à long terme sur la thyroïde n'a encore été rapportée. D'autres études sur les retombées des tests de bombes et accidents nucléaires (comme celui de Three Mile Island) n'ont pas conduit à des résultats concluants. Une relation étroite entre la dose de rayonnement et l'incidence des cancers a été documentée dans l'étude des survivants japonais des bombes atomiques mais le rayonnement reçu était essentiellement externe et la contribution des retombées est incertaine. (suite)
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Nous pensons que l'expérience vécue en Belarus suggère que les conséquences sur la thyroïde humaine, particulièrement celle des foetus et des jeunes enfants, des effets carcinogènes des retombées radioactives sont beaucoup plus élevées que ce que l'on pensait auparavant. Les études sur les habitants des îles Marshall et des survivants japonais des bombes atomiques sur les effets de l'irradiation externe sur la thyroïde suggèrent que l'incidence du cancer de la thyroïde en Bélarus sera accrue pendant de nombreuses années. L'accident et son impact en Bélarus posent un défi à la communauté internationale pour qu'elle apporte son aide à la fois en s'occupant des conséquences sanitaires considérables tant présentes que futures sur la population, mais aussi en encourageant la recherche permettant de comprendre les principes fondamentaux à la base du phénomène. La compréhension des conséquences de Tchernobyl apportera une base importante pour les actions préventives futures". [souligné par nous] Quelques commentaires
Compétence des médecins biélorusses
"C'est le fait de chercher des cancers de la thyroïde qui fait
qu'on en trouve plus"
"C'est trop tôt pour les cancers de la thyroïde et de
plus il n'y a plus de leucémies"
p.7
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En ce qui concerne le temps de
latence nous ferons la remarque suivante:
Un des premiers articles qui sert de référence sur la radjoinduction des cancers de la thyroïde chez les enfants concerne le suivi de 10.842 personnes ayant subi dans l'enfance une irradiation par rayons X du cuir chevelu pour cause de teigne. (E. Ron, B. Modan, Journal Nat. Cancer Inst., vol. 65 no 1 july 1980 "Benign and malignant thyroïd neoplasms after childhood irradiation for tinea capitis"). Il est indiqué que 23 cancers sont apparus entre 4 et 22 ans après l'irradiation (22 ans était alors la durée du suivi) avec une valeur médiane du temps de latence de 15 ans. Ainsi des cancers de la thyroïde sont apparus au bout de 4 ans. Il n'y a donc pas d'incompatibilité avec ce qui est observé en Biélorussie. La grande différence provient de ce que les cancers enregistrés actuellement en Biélorussie ne représentent que le tout début de l'expression des cancers de la thyroïde radioinduits. Pour ce qui est des leucémies, nous rappellerons qu'avant d'être "officialisés" dans Nature , il était fait état de cancers de la thyroïde chez les enfants de Biélorussie (comme d'ailleurs aussi d'Ukraine) mais ces cancers étaient qualifiés de rumeurs sans fondements. De nombreux médecins s'inquiètent actuellement en Ukraine et en Biélorussie du nombre croissant de maladies du sang affectant les enfants, en particulier des anémies et des leucoses et lymphomes. Il faut attendre qu'une étude soit publiée en collaboration avec des médecins occidentaux pour que ces observations sur le terrain soient confirmées ou infirmées. Encore faudrait-il que ces médecins prêts à s'investir dans de telles études n'aient pas les a priori de certains responsables de médecine nucléair e. Dans le cadre d'un article sur les enfants de Tchernobyl (300 enfants ont été reçus dans la région Nord cet été) et sous le titre "Les enfants de Tchernobyl ne sont pas malades des radiations ", affirment le Pr Vergnes et le Dr Coequit, responsables de Médecine Nucléaire à l'hôpital B à Lille. (...)" le l'r Vergnes se déclare prêt au cours de l'interview à aider à la création d'un nouveau dispensaire à Kiev afin de rassurer les familles et "prouver qu'il ne se passe rien"... "en sachant très bien qu'on ne trouvera pas de causes radiopathologiques". Voilà les propos d'un Professeur qui assure la responsabilité de l'enseignement de la médecine nucléaire pour l'ensemble de la région nord. Dans ses cours aux médecins il doit certainement passer sous silence la méthode expérimentale de Claude Bernard et il n'est pas prêt à la mettre en pratique. D'ailleurs plus loin il indique qu' "il n'y a plus aucune équipe qui fasse des recherches sur les conséquences sanitaires de Tchernobyl du point de vue radiologique (effet des radiations). On sait que les doses ont été trop faibles" (!). Etc. etc. toute la page est de la même eau. (Nord Eclair, 13 août 1992) Quelques questions
(suite)
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En avril 1991, à la conférence de Paris sur "Les accidents nucléaires et le futur de l'énergie. Leçons tirées de Tchernobyl ", le Pr Iline indiquait pour les régions les plus touchées par l'iode radioactif en Biélorussie, celles de Gomel et de Moghilev, que 466.600 habitants étaient concernés avec une dose moyenne à la thyroïde de 28,7 rad (centigray) dont 46.700 enfants de moins de 7 ans avec une dose moyenne de 73 rad. (Aucune indication n'est fournie sur les régions de Brest ni de Grodno, au nord-ouest). Le nombre réel de personnes concernées est malheureusement plus élevé que ce qu'indique M. Iline. A titre de comparaison dans l'étude de Modan et Ron citée précédemment la dose moyenne reçue par la thyroïde des enfants a été estimée à 9 rad, et en 22 ans, 23 cancers de la thyroïde ont été enregistrés. Dans cette étude il a été trouvé que 80% des cancers sont du type papillaire (comme dans l'étude des enfants de Biélorussie). Les enfants de moins de 6 ans sont plus sensibles au rayonnement. Cette étude concerne l'irradiation de la thyroïde par une source externe. Il est souvent avancé qu'en Biélorussie il s'agit essentiellement d'une contamination interne par l'iode 131 qui, à dose égale, serait moins efficace qu'une irradiation externe, avec un facteur de réduction important. Or le Comité BEIR de l'académie des sciences des Etats-Unis chargé de la mise à jour des études sur les effets biologiques des rayonnements ionisants indique, dans son rapport BEIR V de 1990, que le risque par iode 131 est 0,66 fois le risque par rayons X. (La marge d'erreur est grande car "les risques provenant de radionucléides à rintérieur de l'organisme ne sont pas bien compris "). Etant donné les niveaux de dose encaissés par la thyroïde en Biélorussie la prise en compte ou non de ce facteur a peu d'importance. Impact sur le bilan sanitaire
p.8
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I. La gravité de l'accident
"Bien que des gaz inertes radioactifs et de l'iodine (sic) se soient échappés dans l'atmosphère par les filtres de la centrale, le niveau de radiation n'a pas excédé les normes autorisées dans ce type d'installation ont indiqué à l'agence des responsables du ministère russe de l'Industrie" (AP, 8h57). (Lorsqu'aucune date n'est mentionnée il s'agira d'un communiqué du 24 mars, l'accident ayant eu lieu à 0h37, heure française). Si les normes autorisées n'ont pas été dépassées on devait en déduire qu'il s'agissait d'un événement sans gravité. Quelques instants plus tard un communiqué précisait: "Selon un responsable russe, il s'agit d'un accident "grave", qui s'est produit dans une centrale du même type que celle de Tchernobyl. Le degré de l'incident est grave avec des conséquences possibles sur l'environnement et la population" a affirmé Iouri Rogojine porte-parole des services d'inspection nuléaire, le Gosatomnadzor. De l'iode radioactif s'est échappé de la centrale "Léningrad" à Sosnovy Bor, à une centaine de kilomètres de Saint-Pétersbourg, et les autorités s'employaient à mesurer la gravité des radiations dégagées. Selon Rogojine, la centrale nucléaire a été fermée mais il n'a pas été en mesure de dire si des radiations fuyaient toujours dans l'atmosphère. Il s'attendait à ce que des centres de contrôle situés en Finlande enregistrent les radiations car les vents dominants soufflent en direction de ce pays." (Reuter, 9h22). La fuite de gaz radioactifs devait être suffisamment importante pour que ce responsable s'attende à le voir arriver en Finlande. Les territoires au voisinage du site n'ont pas pu échapper aux rejets radioactifs. Dans le même communiqué on trouvait une première évaluation: "Selon des données préliminaires, les fuites radioactives correspondent à des niveaux de 1.000 à 3.000 curies, alors que le niveau normal est de 500 curies". A peu près au même instant, d'après AFP: " Des gaz inertes radioactifs ont fui dans l'atmosphère à travers les filtres de la centrale, mais le niveau de radioactivité ne dépasse pas les normes admises, selon le ministère" (AFP, 9h25). (Il s'agit du ministère russe de l'énergie atomique cité par ITAR-TASS). (suite)
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Il n'y a pas de rejets d'iode d'après le ministre russe de l'énergie atomique. Les déclarations qui vont suivre confirment les déclarations du ministre russe: "Moscou, 24 mars (AFP) - L'incident survenu dans la nuit de lundi a mardi à la centrale nucléaire de Saint-Pétersbourg est "sans gravité", a indiqué le service du ministère de l'Energie atomique joint par téléphone. Un porte-parole des services d'inspection nucléaire, le Gosatomnadzor, a également confirmé que l'incident ne présentait actuellement aucun caractère de "gravité", selon les premières informations obtenues à la centrale. ...Des gaz inertes radioactifs ont fui dans l'atmosphère à travers les filtres de la centrale, mais le niveau de radioactivité ne dépasse pas les normes internationales admises, selon le ministère qui a classé l'incident au niveau 3 sur l'échelle de gravité de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (MEA) qui en compte 7." (AFP, 10h21). L'incident fut très rapidement déclassé au niveau 2 par les "autorités russes compétentes" (le niveau 2 est un "incident qui peut entraîner des conséquences pour la sûreté du réacteur"). Il ne s'agit plus que d'un événement dont la gravité se situait un peu au-dessus de l'anomalie de fonctionnement. "Les Russes confirment à l'AIEA la minimisation de l'incident nucléaire, VIENNE, 24 mars (AFP) - Les responsables de l'exploitation des centrales nucléaires de Russie ont indiqué à l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AIEA) que la gravité de l'incident survenu dans la centrale de Sosnovy Bor près de Saint-Pétersbourg était estimée au niveau 2 sur l'Echelle Internationale des Evénements Nucléaires, selon un communiqué de l'AIEA diffusé mardi à Vienne." (AFP, 23 h 12). La situation n'est cependant pas aussi évidente en ce qui concerne la gravité de l'événement. Le communiqué de l'Agence de Vienne cité ci-dessus se termine par: "La gravité de l'incident sera établie avec plus d'exactitude lorsque les experts auront procédé à d'autres évaluations, selon le communiqué." II. Les dégâts sur le réacteur
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III. Les normes "autorisées"
Il est souvent mentionné dang les communiqués l'existence de normes autorisées. Tantôt elles sont qualifiées de "pour ce type d'installation", tantôt d"'internationales", parfois de "niveau normal", tantôt de "normes autorisées". Ce qui est commun à ces diverses qualifications c'est qu'à aucun moment il n'est donné d'indications sur ces fameuses normes. A titre indicatif nous donnons les niveaux de rejets gazeux autorisés en France par les arrêtés ministériels pour les réacteurs PWR: 825 térabecquerels (22.500 curies) pour les gaz; 27,5 gigabecquerels (0,75 curie) pour les halogènes gazeux (iodes) et les aérosols. Ces valeurs sont données pour 1 réacteur par an. Remarque: Pour Creys-Malville, l'arrêté du 6 août 1985 autorise des rejets annuels de: 220 térabecquerels (6.000 curies) pour les gaz, 5 gigabecquerels (0,14 curie) pour les halogènes gazeux et les aérosols. Quel que soit le type de réacteur il est précisé que "ces rejets ne doivent en aucun cas ajouter d'émetteurs alpha à l'environnement". D'après Reuter (9 h 22) "le niveau normal est de 500 curies ". Dans un communiqué AFP (11 h 38), l'Agence de Vienne mentionne sans autre précision "La fuite ne dépasse cependant pas les normes autorisées". Le ministère de l'énergie atomique indique: " Des gaz inertes radioactifs ont fui dans l'atmosphère... mais le niveau de radioactivité ne dépasse pas les normes internationales admises" (AFP, 10h21). (L'iode a disparu). Selon un communiqué du 25 mars en provenance de Sosnovy Bor: "Les officiels ont expliqué que la fuite s'était produite dans un "canal technique" à l'intérieur du troisième réacteur. Ils ont admis que cette fuite a laissé échapper des gaz chargés d'iode 131 dans l'atmosphère. Mais au cours de la journée de mardi les niveaux des autres gaz inertes radioactifs comme le krypton et le xénon ont atteint 1.111 curies, ce qui est bien en-dessous des normes internationales de 2.000 curies par jour, ont dit ces responsables." (AFP). Ainsi à 2.000 curies par jour une centrale pourrait rejeter 730.000 curies par an de gaz radioactifs. Les normes françaises seraient-elles si basses par rapport aux normes internationales alors que les Allemands leur reprochent d'être au-dessus de ce qui est autorisé chez eux? Enfin il faut remarquer que les gaz inertes, l'iode et les aérosols sont traités en vrac alors que les normes en principe les traitent séparément et les niveaux de rejets autorisés sont très différents. IV. Les rejets
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Cela signifie que les fuites ont continué pendant la journée de mercredi alors que les communiqués antérieurs nous avaient indiqué que les fuites avaient cessé rapidement. D'autre part aucune indication n'est donnée sur les rejets d'iode et d'aérosols (césium) alors que c'est là le point le plus important pour évaluer la gravité de l'accident. V. La contamination sur le site et dans le voisinage
Remarque: l'utilisation de personnel intérimaire ("occasionnel") semble bien être une pratique courante dans l'industrie nucléaire quel que soit le pays... p.10
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VI. La contamination hors du site
On a vu dans le premier communiqué cité, qu'un responsable russe, dès le début de l'accident, prévoyait l'arrivée de la radioactivité en Finlande. Plusieurs communiqués font état de l'absence de radioactivité dans les pays qui n'étaient pas sous le vent. Il paraît évident que les experts s'attendaient à ce que la contamination arrive en Finlande et en Suède: "EDF s' est aussi renseignée en Finlande et en Suède où aucune radioactivité n'a été mesurée pour l'instant" (souligné par nous) (AFP, il h 42). "Les responsables de la centrale ont affirmé que la fuite radioactive n'avait à aucun moment fait peser le moindre risque aux populations vivant dans les environs. Ils ont déclaré que le degré de radioactivité autour de la centrale et dans les villes voisines était normal." (AFP, 25 mars). Ainsi il semble tout à fait normal que ce soient les responsables d'un accident qui peut affecter la santé de la population qui évaluent eux-mêmes les dangers qu'ils font courir à cette population. Aucune déclaration de responsables de la santé n'a été rapportée. Rappelons qu'en France, en mai 1986 lorsque l'opinion publique était inquiète des retombées de Tchernobyl, c'est le ministre de l'industrie qui est intervenu publiquement pour rassurer les Français, les ministres de la santé et de l'environnement restant dans les coulisses. Le 25 mars on apprenait que la contamination radioactive avait été détectée en Finlande: "Helsinki, 25 mars (AFP) - De l'iode et du césium radioactifs ont été détectés à Lovisa, un port situé a 100 km à l'est d'Helsinki et à environ 240km à l'ouest de Saint-Pétersbourg, ainsi que dans le port de Kotka, près de la frontière russe, a annoncé mercredi le centre de sécurité des rayons radioactifs à Helsinki." (AFP, 25 mars, 11h47). "En Estonie, le niveau de radioactivité a doublé, mardi soir à Narva, ville frontalière de la Russie, a rapporté le ministre des Affaires étrangères, Lennart Meri". (D'après AFP, cité par le journal Libération du 26 mars). Aucune indication quantitative n'est fournie quant à la contamination mesurée; la radioprotection manifestement ne relève pas d'une approche quantitative. Cela ne semble guère gêner les organes d'information qui à aucun moment n'ont relevé cette anomalie. Ainsi la radioactivité a pu passer du réacteur à la Finlande sans passer par le voisinage du site! Enfin signalons que, n'ayant jamais été anormale, la situation radiologique redevient normale le 25 mars à Saint-Pétersbourg: "Moscou, 25 mars (AFP) - Les niveaux de radiation à la centrale électro-nucléaire Léningrad et dans les environs de Saint-Pétersbourg sont revenus à la "normale" après la fuite accidentelle mardi de gaz radioactjfs, a annoncé mercredi Radio-Moscou." (AFP, 25mars, 10h07). Les communiqués quotidiens du Service central de Protection contre les Rayonnements Ionisants, (dépendant du ministère français de la santé) avaient signalé en mai 1986 une curiosité analogue sur le territoire français après Tchernobyl. VII. Le rôle de l'Agence Internationale de l'Energie
Atomique (AIEA)
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...Le Comité d'Etat russe sur les situation d'urgence aprécisé qu'a 11h30 heure locale (08h0 GMT), neuf heures après l'incident, les émissions de gaz inertes étaient six fois plus élevées que les normes quotidiennes, celle de l'iode dix fois plus." (Reuter, 16h02). L'Agence sert de caution en cas d'accident: "M. Carlier (responsable de l'exploitation du parc nucléaire d'EDF) a souligné que les contrôles sont supervisés par l'AIEA." (AFP, 11h41). Depuis la catastrophe de Tchernobyl l'AIEA s'est chargée des problèmes de sûreté nucléaire et aussi de la protection sanitaire des populations. Il est bon de connaître ce que le directeur de la sûreté nucléaire de l'AIEA, M. Rosen, considère comme normal. Il déclarait en août 1986 à la conférence de Vienne, à propos de Tchernobyl: " Même s'il y avait un accident de ce type tous les ans, je considérerais le nucléaire comme une source d'énergie intéressante" propos rapportés par le journal Le Monde du 28 août 1986). Une des fonctions de l'Agence est "d'encourager et de faciliter, dans le monde entier, le développement et l'utilisation pratique de l'énergie atomique à des fins pacifiques" (Art. 3-A-1, Traité du 26octobre 1956). Ainsi l'AIEA est le promoteur international de l'énergie nucléaire et quand cette agence intervient pour évaluer les effets sanitaires d'un accident il y a manifestement conflit d'intérêt. La reconnaissance que les installations nucléaires peuvent conduire à mettre en danger la santé des populations, gêne considérablement la promotion de l'énergie nucléaire. En conclusion
L'accident de Sosnovy Bor nous permet de voir comment pourrait se dérouler le scénario de la gestion médiatique d'une catastrophe nucléaire future. 20 avril 1992
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