1- PRÉAMBULE
Le palier N4 fait suite aux paliers 900 MWé (34 unités)
et 1300 MWé (20 unités). Les évolutions dans sa conception
prennent en compte les 700 années-réacteur de retour d'expérience
en exploitation du parc nucléaire d'EDF, ainsi que les enseignements
de l'accident de Three Mile Island (1979). Il se situe dans la continuité
du programme électronucléaire français.
Le retour d'expérience de l'exploitation des réacteurs des paliers 900 et 1300 MWé a nourri la réflexion sur la conception des systèmes, des équipements, et du mode d'exploitation du palier N4. Dans certains cas, ces réflexions ont également conduit à l'intégration des modifications en parallèle sur le parc en exploitation.
L'amélioration de son niveau de sûreté a été un souci permanent.
ÇHOOZ B 1, tête de série du palier N4, est le cinquante-cinquième réacteur à eau pressurisée, conçu et réalisé en France pour EDF. Il constitue une étape majeure dans le programme électronucléaire français, de par sa puissance (1450 MWé), et sa conception entièrement française.
2- LES PRINCIPALES INNOVATIONS DU PALIl'.R N4
Le palier N4 a permis de franciser la filière avec pour objectifs
d'améliorer la sûreté, d'augmenter le rendement des
équipements et de réduire ainsi les coûts par kW produit.
Les principales innovations concernent:
- des générateurs de vapeur en Inconel 690 pour limiter
les problèmes de corrosion et avec économiseur pour améliorer
le rendement des échanges,
- la conduite accidentelle par état entièrement informatisée,
y compris pour les états d'arrêt du réacteur,
- la conception d'une salle de commande à l'ergonomie optimisée
sur la base du retour d'expérience et des technologies de contrôle-commande
les plus modernes,
- l'amélioration de la conception des systèmes de sauvegarde
qui donne aux opérateurs un délai de réflexion plus
long avant action volontaire lors d'un accident,
- La turbine «ARABELLE» comportant en une seule ligne d'arbre
un corps Haute Pression - Moyenne Pression (HP-MP) combiné, au lieu
du corps Haute Pression (HP) des paliers précédents et trois
corps Basse Pression (BP).
3- LES PRINCIPALES ÉTAPES DU DÉMARRAGE
Trois des quatre unités ont été raccordées
au réseau électrique national respectivement le 30/08/96
et le 10/04/97 pour les deux unités de CHOOZ B dans les Ardennes
et le 24/12/97 pour l'unité 1 de CIVAUX dans la Vienne. Le premier
chargement en combustible de la 2ème unité de CIVAUX est
prévu en mai 1999 et le premier raccordement au réseau électrique
fin 1999.
L'essentiel du retard à la mise en exploitation définitive des unités a été causé par les difficultés techniques à mettre au point le nouveau système informatisé de commande de la centrale. La décision en cours de projet d'abandonner le matériel français CEGELEC P20 et de le remplacer par du matériel éprouvé industriellement HARTMAN et BRAUN, a retardé d'environ quatre ans le démarrage de la première unité.
Après cet aléa, la mise au point des systèmes ou matériels nouveaux a pu reprendre.
Les causes des retards supplémentaires (environ deux ans) sont liées à la mise au point comme sur tout nouveau palier technique des équipements les plus innovants. Pour le palier N4, on peut citer: la turbine, les guides de grappes, les pompes primaires et les modifications du système de refroidissement du réacteur à l'arrêt (RRA).
4- VALIDATION DES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS
Le contrôle commande
Le système de contrôle commande totalement informatisé
constitue une innovation majeure. Nous pouvons dès à présent
tirer un bilan positif de sa mise en oeuvre et des premiers mois d'exploitation:
- en premier lieu, ce bilan confirme l'aptitude d'un système
de Contrôle-Commande complètement informatisé à
répondre aux exigences de fiabilité, sûreté
de fonctionnement et exploitation nécessaire à la conduite
d'une tranche nucléaire.
- en deuxième lieu. cette mise en oeuvre confirme la
validité des options techniques retenues par EDF et ses fournisseurs
aussi bien au niveau de l'architecture d'ensemble du système que
de la conception de chaque sous-ensemble. A souligner en particulier la
démonstration qu'il est possible de retenir un automate industriel
courant non spécifique à l'industrie nucléaire, pour
la mise en oeuvre d'une grande partie des automatismes de la Centrale.
- enfin, il n'y a pas eu à ce jour d'incident significatif
lié à l'informatisation des données. Ceci valide l'architecture
de la chaîne Conception Assistée par Ordinateur (CAO) ainsi
que tout le processus extrêmement rigoureux de saisie, validation
et intégration des données dans le système.
- le retour d'expérience de ce système de Contrôle-Commande
se poursuit et les améliorations feront l'objet d'une intégration
à l'occasion des premiers arrêts pour rechargement des tranches.
Le changement des guides de grappes
Les grappes de commande ont pour rôle de maîtriser la réaction
nucléaire. Elles pénètrent dans le coeur du réacteur
en coulissant dans des tubes-guides. En cas d'arrêt d'urgence, ces
grappes de commande doivent pouvoir descendre dans le coeur très
rapidement. Une valeur maximale du temps d'insertion des grappes a été
fixée, en se basant sur la cinétique des accidents envisages.
Pour le palier N4, un nouveau guide de grappes a ete conçu pour
améliorer le comportement vibratoire des crayons de grappes au droit
des cartes de guidage.
Après la mise en évidence de temps de chute supérieurs
au critère de sûreté pour ces nouveaux guides de grappes
(installés à DAYA BAY et sur le palier N4) et les investigations
menées, la décision a été prise de les remplacer
en totalité par des guides de grappe de type 1300 MWé.
Le retard pris sur le N4 résulte essentiellement de la priori-é
donnée par EDF à la résolution du problème
à DAYA BAY, à une époque où les négociations
de LING AO étaient primordiales.
Le comportement des groupes motopompes primaires
Les pompes primaires du palier N4 sont d'une conception différente
des pompes des paliers précédents. En particulier, elles
sont équipées d'une nouvelle hydraulique qui permet de disposer
d'un débit plus important.
Au cours des différents essais réalisés sur boucle
d'essais et sur site, il a été constaté une dérive
des caractéristiques des pompes, pouvant entraîner une augmentation
de quelques % du débit d'eau primaire dans la cuve du réacteur.
Les conséquences potentielles de cette augmentation du débit
sont:
- un meilleur refroidissement des assemblages combustible mais à
l'inverse une très légère augmentation du temps de
chute des grappes de commande;
- et une réduction de la marge relative à la tenue mécanique
des assemblages combustibles.
L'origine de cette anomalie a fait l'objet de nombreuses investigations
et l'évolution du débit de la cuve est surveillée
en permanence, de manière à garantir que ce débit
reste dans des limites acceptables pour la sûreté.
Le règlement définitif de cette affaire est en cours
et fait l'objet de discussions avec l'Autorité de Sûreté.
La résistance à la fatigue thermique suite à
l'incident RRA de CIVAUX I du 12/5/98
La fissuration du RRA de CIVAUX 1 a conduit à la décision
de décharger les trois tranches du palier.
L'origine de cette fuite localisée sur un coude RRA est imputable,
d'une part à une conception de la zone de mélange incriminée
moins favorable que celle adoptée sur les paliers précédents,
et d'autre part à un fonctionnement prolongé du circuit RRA
à fort écart de température dans la zone de mélange
principale; ce type de fonctionnement en période de démarrage
est d'une durée très supérieure à la pratique
habituelle lors de l'exploitation normale des tranches.
L'ensemble des mesures mises en oeuvre en terme:
- de conception du circuit diminuant les sollicitations (mélange
optimal, installation générale),
- de dispositions constructives renforçant la tenue à
la fatigue thermique de la zone de mélange (matériels monoblocs,
éloignement et arasage/polissage des soudures),
-de suivi du fonctionnement à fort écart de température,
permettent dès à présent de garantir la sûreté
de la nouvelle conception du circuit RRA à minima jusqu'au terme
du premier cycle de chacun des réacteurs du palier N4. Un protramme
de recherche et développement est d'ores et déjà engagé
pour permettre de proposer des règles de conception permettant d'éviter
à l'avenir ce type de difficultés.
Le défaut de soudure des aubages fixes du corps Haute Moyenne
Pression de la turbine
Le palier N4 est équipé de turbines de nouvelle génération.
Ces turbines intègrent plusieurs innovations technologiques qui
les rendent plus légères, plus compactes et qui améliorent
leur rendement.
Les contrôles effectués en mars 1998, sur les deux tranches
de CHOOZ B ont mis en évidence la fissuration de plusieurs soudures
sur les aubages fixes Haute Pression et Moyenne Pression, ainsi que des
ruptures de chapeau d'ailettes sur les rotors Basse Pression. La conception
de ces éléments n'étant pas identique pour chaque
turbine, ces défauts affectent essentiellement CHOOZ B 1, mais aussi
CHOOZ B2 et CIVAUX sur les diaphragmes Moyenne Pression.
Un scénario de remplacement et/ou de renforcement des pièces
turbines a été décidé mi-98, puis revisé
à mi-oc-tobre par ALSTHOM et les réparations, mises en oeuvre.
CONCLUSIONS
L'introduction d'une salle de commande totalement informatisée
qui constitue l'innovation majeure du palier N4 a été validée
par les premiers mois d'exploitation.
La période d'indisponibilité récente d'environ
une année supplémentaire est due pour l'essentiel:
- 1a la Turbine ALSTOM Arabelle de conception nouvelle qui a nécessité
des modifications importantes suite aux défauts constatés
en exploitation.
- à la sensibilité à la fatigue thermique du circuit
de refroidissement du réacteur qui a été modifié
suite à l'incident du 12 mai sur l'unité de CIVAUX 1.
En effet, quelque soit le soin apporté à la conception, il n'est pas possible d'éviter l'apparition d'anomalies dans les premières années d'exploitation. Sur tous les paliers nucléaires, une phase de mise au point a toujours été nécessaire.
Par rapport aux démarrages des paliers précédents 900 et 1300 MW, les anomalies rencontrées ne sont pas plus nombreuses. Leur impact en délais a été supérieur pour la partie la plus innovante: le contrôle-commande.
COMMENTAIRE GAZETTE
Je trouve ce papier fort intéressant à plus d'un titre. En effet il n'est pas fait allusion aux problèmes de santé soulevés par les amibes et qui obligent EDF à des contorsions. Comment traiter l'eau puisque le chlore (eau de javel) est inefficace sauf à des doses telles (et encore) que la Vienne ne pourra plus être considérée comme une rivière. Et le poids radioactif futur d'interventions telles que celle réalisée 5 mois après le démarrage du réacteur pour cause de fissuration inattendue!
Ensuite l'analyse technique est tout de même un peu courte,
je veux bien que les paliers aient des problèmes mais naïvement
j'aurais pensé que «les améliorations» étaient
testées AVANT la montée en puissance, ce qui manifèstement
n'est pas le cas. Si on peut réparer de l'informatique c'est-à-dire
rendre un programme fiable on ne le pourra pas pour les puces associées
et ça restera la grosse inconnue, génératrice de problèmes
à terme. Quant à la turbine ou aux défauts d'étanchéité
sur les générateurs de vapeur c'est vite dit «défauts
de réalisation».
Intéressant, alors où est la qualité nucléaire,
son suivi?
La DSIN n' est pas sur les sites en permanence, que va-t-il se passer avec une telle accumulation d' «erreurs», erreurs c'est vite dit. A partir du moment oû il s'agit d'une mauvaise conception, la réparation est du bidouillage. Qu'on se soit planté à Daya Bay avec des barres de contrôles qui ne voulaient pas descendre est déjà révélateur d'une incohérence (c'est le moins qu'on puisse dire) dans la délivrance d'autorisation pour accepter une modification. Qu'on ait recommencé avec l'informatique, le RRA et la turbine en passant par des tas de trucs que je ne citerai pas prouve qu'on persiste un peu trop dans l'erreur.
Il n'est pas sérieux d'expliquer gravement que le RRA n 'est pas prévu pour supporter un «fort écart de température» plus que quelques heures sur toute la vie de la centra/e. Ce qui fait qu'en 5 mois on a crevé le plafond (pour un réacteur qui doit vivre 40 ans!!!) et fissuré les circuits de refroidissement.
Je n'insisterai pas sauf pour terminer sur une anecdote révélatrice.
A la question d'un participant à la CLI «Pourquoi prélever
le lait dans des fèrmes non situées sous les vents dominants?»
La réponse fut «L'analyse de la survie des fermes du secteur
pour des contrats de longue durée a montré que ce seront
ces fermes qui subsisteront dans le futur...» Très bien
et alors ? Ceci est la surveillance vue par EDF...