GAZETTE NUCLEAIRE
PEUT-ON ENSEIGNER LA THERMODYNAMIQUE

APRES LE TOUT-ELECTRIQUE ?
Maurice PASDELOUP
enseignant la chimie physique à l’université Paul-Sabatier, formateur au Centre d’initiation à l’enseignement supérieur (CIES) de Toulouse

     Les locataires des Grands Pêchers interrogés dans le documentaire de Nils et Bertrand Tavernier (De l’autre côté du périph’, France 2, 14/12/97) ont vivement dénoncé le chauffage électrique de leurs HLM comme fauteur d’inconfort et de charges exorbitantes (14 000 F pour un F3...). Et l’un d’eux répéta cette question avec véhémence : pourquoi ne pas avoir installé le chauffage central au gaz ?
     Une enquête complémentaire auprès des responsables des HLM donne la réponse : c’est sous la pression d’EDF-GDF qui lançait sa campagne de promotion du "tout-électrique" qu’ils ont fait équiper tous ces logements du chauffage électrique par convecteurs. Ils s’en excusent aujourd’hui, et déclarent avoir compris que EDF visait simplement à faire consommer toujours plus d’électricité. Et que Gaz de France, qui était alors sous la même direction, allait même jusqu’à proposer des tarifs inabordables pour inciter les promoteurs à se rabattre sur l’électricité [1] .

Horreur économique et horreur scientifique
     Il me semble que c’est le moment de rappeler qu’à cette "horreur économique" s’ajoute une horreur scientifique : si on utilise directement le combustible primaire (gaz, fioul...), on en tire 100% de sa chaleur, alors que si on passe par une centrale électrique, on ne peut en convertir qu’environ 30% en électricité, qu’il est aberrant de retransformer en chaleur pour se chauffer. Pas étonnant que cette aberration, de plus couverte par de somptueuses opérations publicitaires, finisse par revenir cher ! Mais ce que ne sait sans doute pas cet habitant des Grands Pêchers, c’est qu’elle contrevient aussi aux règles les plus élémentaires de la thermodynamique, qui imposent que les services de la fée électricité soient réservés à ce qui ne peut se faire que par elle.
     Ayant enseigné pendant plusieurs années la chimie physique en premier cycle universitaire, j’ai dû traiter parmi d’autres le difficile sujet des bases et des conséquences du deuxième principe de la thermodynamique. Or, je me souviens que dans les années 1980, alors que j’avais cru faire comprendre à mes étudiants pourquoi il était aberrant d’utiliser l’électricité pour le chauffage domestique par appareils à résistances (limités jusqu’à cette époque au chauffage d’appoint), j’eus la surprise de voir, à notre sortie de l’amphi, qu’un immense panneau vantant les avantages du "tout électrique"venait d’être hissé sur le chantier de construction voisin. Quelle opinion, dans ces conditions, les étudiants allaient-ils pouvoir se faire sur les dispositifs thermodynamiquement fondés que j’avais cités : co-utilisation de la chaleur dissipée à la source de l’énergie mécanique ou électrique produite par machine thermique (ce qu’on appelle plus communément "cogénération"), et installation de pompes à chaleur ?

La cogénération : le simple bon sens éclairé par la thermodynamique
     Quand on fonctionne en cogénération, on produit de l’électricité et on utilise en même temps la chaleur dégagée par la machine. Pourquoi est-ce que ça devrait être la règle pour les centrales thermiques ? Parce qu’avec une machine thermique on ne peut pas transformer en électricité la totalité de l’énergie primaire produite par la source chaude: 

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une partie importante doit obligatoirement transiter vers la source froide pour que la machine tourne (figure 1). Cette partie est donc produite de toute façon, mais on ne peut l’utiliser que sous forme de chaleur. Dont on peut cependant tirer profit, puisque nos locaux à chauffer font naturellement partie de la source froide (extérieur de la machine). C’est ainsi qu’on chauffe l’habitacle de nos voitures tout en roulant, à partir de la chaleur dégagée par le moteur. On fait alors de la cogénération sans le savoir, parce que ça procède du simple bon sens, en même temps que du "deuxième principe" de la thermodynamique... De même, sous nos climats nous avons souvent besoin d’électricité et de nous chauffer en même temps.
     Pourquoi alors cette logique ne s’est-elle pas imposée ? A propos de la cogénération, on va bien sûr objecter la difficulté qu’il y a à transporter la chaleur aussi facilement et aussi loin que l’électricité. Des compagnies de distribution de chaleur existaient pourtant dans certaines grandes villes, et à Paris en particulier, ceci avant qu’on y ait généralisé le réseau électrique. Comment se fait-il alors qu’on ait cru devoir planifier et construire des sites de production d’électricité en ignorant ces réseaux de chaleur ? Et qu’on ait persisté dans l’augmentation de taille des centrales thermiques, dont la puissance a été multipliée par dix durant ces quarante dernières années [2] . Ce qui rend d’autant plus problématique l’utilisation conjointe de l’électricité et de la chaleur qui doit obligatoirement aller à la source froide.
     Car pour que ce soit intéressant, il faut que leur puissance n’excède pas trop les besoins en chauffage de proximité du secteur concerné. Ce qui implique un maillage du territoire analogue à celui des anciennes usines à gaz ou du réseau d’alimentation en eau aujourd’hui, par villes ou groupements de communes. Pourquoi pas ? Mais de plus en plus difficile à réaliser avec la multiplication des centrales nucléaires modèle américain Westinghouse. Ces monstres sont aussi des centrales thermiques, ce qu’on a bien su nous faire oublier. Que la source chaude vienne d’une matière à noyaux fissiles et non d’un combustible chimique ne change rien à l’affaire : nous sommes censés le savoir depuis Carnot (1824), le rendement ne dépend que des températures des sources chaude et froide. Et le rendement des centrales nucléaires, 33%, est inférieur à celui des centrales à gaz, qui dépasse parfois les 40%. Mais avec une seule tranche nucléaire de 1200 Mégawatts électriques, les besoins en chauffage de proximité sont dérisoires par rapport aux 2400 Mégawatts de chaleur qu’il faut écouler, de sorte qu’on a beau jeu de préférer les évacuer en pure perte dans l’atmosphère : cf. les énormes tours de refroidissement qui flanquent les centrales nucléaires.

"Le nucléaire n’est pas pire que le reste..."
     On peut cependant concéder au lobby des "électriciens"que le nucléaire bien assumé (transparence des choix et des risques, vérité des coûts) n’est pas, à tout prendre, pire que le reste. Il faut se souvenir que ces gigantesques machines nucléaires thermiques dérivent des mêmes prototypes que les réacteurs à eau pressurisée (REP) qui équipent les sous-marins à propulsion nucléaire [3] . Il y a donc des puissances intermédiaires dont la technologie est bien maîtrisée et qui pourraient servir en cogénération suivant le système d’électrification décentralisée. 

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     Il y a une belle diversité de petits générateurs nucléaires embarqués à bord des engins spatiaux [4], et on dit que des générateurs électronucléaires de quelques centaines de Kilowatts ont fonctionné dans des endroits reculés de l’ex-URSS. De tels systèmes, comme de nombreux autres plus classiques, ne sont pas seulement valables pour les pays en développement [5] , comme on cherche à nous le faire croire. Montés chez nous en cogénérateurs, ils permettraient d’énormes économies à la production et sans privations pour le public. Pour une centrale thermique dont le rendement électrique est de 40%, on peut en plus tirer 40% en chaleur pour le chauffage, ce qui double le rendement global. Et si la turbine est moins performante, donc moins coûteuse, le rendement électrique baisse mais le rendement thermique augmente d’autant...
     Cette quantité de chaleur qui, dans une machine thermique, doit obligatoirement aller à la source froide, les industriels de l’énergie la considèrent toujours comme une perte inévitable. Pourtant, cette phase est aussi active que les autres dans le cycle de Carnot, qui affirme dès 1824 : il ne suffit pas, pour donner naissance à la puissance motrice, de produire de la chaleur, il faut encore se procurer du froid ; sans lui la chaleur serait inutile. A son époque, le rendement des machines à vapeur restait dérisoire, malgré les ingénieuses mais tâtonnantes améliorations de Watt. C’est pour remédier à cette situation de gaspillage brouillon que le jeune Sadi Carnot s’engagea dans une subtile et géniale méditation sur la "puissance motrice du feu" [6] qui, après que Thomson (futur Kelvin) et Clausius eurent résolu l’apparente contradiction de sa théorie avec les résultats de Joule, servit de fondements à la thermodynamique, nouvelle science montante du 19ème siècle, indépendante et rivale de la mécanique alors toute puissante. Dans la forme achevée de la thermodynamique classique, il apparaissait bien que l’énergie mécanique produite par machine thermique est indissociable de cette chaleur qui doit transiter de la source chaude à la source froide, et donc qu’il faut les utiliser conjointement si on veut tirer le meilleur profit du combustible dépensé. Une autre intuition de Carnot se trouva confirmée. La machine peut marcher en sens inverse: en lui fournissant de la puissance motrice, on peut faire revenir de la chaleur de la source froide à la source chaude (figure 2). C’est le principe des pompes à chaleur.

Une perte massive, refusée seulement par une minorité de professionnels avisés
     Malgré l’évidence de ces données, ce furent plutôt des améliorations d’ordre mécanique qui furent apportées aux machines, comme le remplacement du système alternatif piston-cylindre par la turbine. L’adoption des moteurs à combustion interne à essence ou Diesel qui équipent les automobiles n’est pas une révolution par rapport au cycle de Carnot : leur rendement en énergie mécanique plafonne à 20-25%.
     On n’a que rarement cherché à tirer partie des deux flux qui s’écoulent au travers des machines thermiques, et on laisse toujours se perdre le plus abondant : en dehors de quelques industriels avisés [7], certains établissements ont quand même surmonté cette désinformation généralisée. Ce sont ceux qui, comme les hôpitaux, sont obligés de maintenir en parfait état de marche un groupe électrogène de secours puissant et efficace. A l’avantage thermodynamique s’ajoute pour eux celui de pouvoir amortir des frais fixes qu’ils doivent de toute façon supporter. Un moteur à gaz ou Diesel assure la période de chauffe tout en produisant de l’électricité qui est achetée par EDF : les hôpitaux de Lens, de Castres, de Périgueux, une clinique à Toulouse, la prison centrale de Muret, de même que certains incinérateurs alimentant le chauffage urbain, se sont équipés de cogénérateurs.

La stratégie de l'écrémeuse...
     L'industrie de l'énergie opérant à partir des différentes sources de chaleur devrait pouvoir se comparer avec l'industrie laitière. Depuis longtemps, on utilise une grande partie du lait des vaches pour en tirer du beurre, mais on tire aussi parti du lait écrémé, autrefois pour faire la pâtée des cochons et des volailles, aujourd'hui par de multiples autres valorisations. Or, la machine thermique (figure 1) qui tire de sa chaudière de l'énergie mécanique (la crème) transformée ensuite en électricité (le beurre) fonctionne à la manière d'une écrémeuse... auto-entretenue ! Mais le sous-produit, ici la chaleur qui doit retourner au milieu environnant par la source froide, est en l'absence de cogénération traité comme si la laiterie rejetait directement son lait écrémé avec ses eaux usées, alors qu'il peut servir de base pour d'autres aliments... Ce que ne se permettent pas les industriels du lait, semble au contraire aller de soi pour ceux de l'énergie ! Pour nourrir la basse-cour, on achètera à l'extérieur... Curieuse gestion de ses produits !

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     La métaphore de l'écrémeuse nous montre aussi que nous-mêmes en tant qu'utilisateurs de combustibles, nous ne faisons pas pour le mieux, même avec la meilleure des chaudières. Utiliser directement toute la chaleur produite pour se chauffer, c'est comme si un paysan versait de suite le lait de sa traite dans l'auge des cochons... Un meilleur usage se ferait en remplaçant les chaudières par des modules de cogénération, qui "écrémeraient" la partie qui peut être transformée en électricité, le reste (c'est-à-dire au moins les deux-tiers) étant utilisé pour le chauffage. L'électricité produite, auto-consommée ou envoyée sur le réseau, amènerait à réduire le nombre et la puissance des centrales, nucléaires ou autres. On aurait alors une gestion globale de nos énergies en accord avec la thermodynamique la plus élémentaire. On ne devrait pas pour autant se trouver "hors économie" puisque, malgré les manipulations de tarifs, le kilowatt-heure électrique est payé par EDF de l'ordre de 35 centimes, alors que le kilowatt-heure thermique ne dépasse guère les 10 centimes.
     Voilà donc des idées toutes simples, qui n'impliquent que les technologies banales et bien rodées du chauffage central et des moteurs thermiques. Pour ces derniers, les fabricants de cogénérateurs (ils sont quand même cinq ou six en France) ont trouvé un autre débouché que dans les automobiles, ce dont, soit dit en passant, le PDG de notre firme nationale s'est montré incapable...

Face aux diktats de la pensée unique
     Si la Commission européenne cherche à faire passer la part d’électricité produite en cogénération de 9 à 18% d’ici à 2010 [8] , celle-ci reste infinitésimale en France. EDF fait tout pour freiner le développement des petites centrales, dont elle est obligée d’acheter la production, de par son statut de monopole. L’entreprise publique a été sévèrement condamnée par le Conseil de la concurrence début 1997 pour abus de position dominante vis-à-vis de la Compagnie générale de chauffe, qui pratique la cogénération [9].
     On est frappé par la pensée unique, centralisatrice, dogmatique, antiscientifique, qui continue de prévaloir face à la diversité des solutions rationnellement et économiquement fondées. Car il ne s’agit pas là d’économies de bout de chandelle comme avec les lampes à basse consommation, ou les illusoires et coûteux systèmes de régulation et d’isolation à outrance qui iraient bien jusqu'à transformer nos habitations en véritables thermostats... Il s’agit de possibilités de réduction massive de la consommation en énergies primaires, par des technologies existantes simples, sans privations sensibles pour les consommateurs, donc avantageuses au triple plan économique, humain et environnemental.
     Au lieu de ça, c’est une culture de l’hégémonie au prix du gaspillage qui se maintient envers et contre tout, comme si les Carnot, Thomson et Clausius n’avaient pas existé. A quoi bon alors enseigner la thermodynamique ?

Les pompes à chaleur : une merveille offerte par la thermodynamique
     C’est que de plus, il y a une façon intelligente et pertinente, parce qu’en accord avec les lois de la thermodynamique, d’utiliser l’électricité pour se chauffer. C’est le système des pompes à chaleur : en apportant de l’énergie mécanique, on fait remonter de la chaleur de la source froide (l’extérieur) vers la source chaude (les locaux à chauffer). Il se trouve que ceci peut se faire à très bon compte car dans ce cycle inversé (figure 2) la différence entre la température de la source froide et celle de la source chaude est beaucoup plus faible que dans le cas du cycle moteur, où on cherche au contraire à la rendre aussi grande que possible pour reculer la limite du rendement théorique dictée par le principe de Carnot. Pour la pompe à chaleur, on définit un "coefficient de performance" (Cop) qui est le rapport entre la quantité de chaleur qu’elle fait ainsi remonter et l’énergie électrique qu’elle consomme. On ne peut plus parler de "rendement" car ce Cop est très supérieur à 1: il est théoriquement de l’ordre de 10, et en pratique d’environ 3 à 4 [10]. Les pompes à chaleur sont donc une merveille thermodynamique qui permet d’obtenir 3 à 4 fois plus de chaleur que d’électricité consommée pour cela. C’est sans doute ce qui chagrine les marchands d’électricité, qui ne les ont jamais encouragées, sauf par une discrète allusion aux climatiseurs inversables qui peuvent assurer une fonction chauffage, et pendant une courte période en 1978-80 où EDF avait monté le programme "Perche" pour le système air-air, le moins performant par rapport à ceux qui opèrent à partir de la nappe phréatique (puits) ou de capteurs enterrés. Le mercantilisme que manifeste un tel black-out est là encore indigne d’une entreprise publique (11). D’autant plus que là aussi la technologie et le savoir-faire existent et sont bien rodés : ce sont les mêmes que pour les réfrigérateurs et les intallations frigorifiques.

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Qu’adviendrait-il si les lois de la physique figuraient au code civil ?...
     Il faut rappeler que le chauffage électrique (par radiateurs à effet Joule, le plus anti-thermodynamique qui soit) représente 47% de la puissance "appelée en pointe" dans l’habitat [12]. Et surtout que la campagne de publicité que nous assène régulièrement pour cela EDF depuis 20 ans lui (nous) coûte ces dernières années dix fois le budget de l’Agence de l’environnement et pour la maîtrise de l’énergie (ADEME) [13]. Comment alors comprendre que ce soient les responsables du marketing qui fassent la loi dans une entreprise publique où presque tous les cadres supérieurs sortent de Polytechnique (ou d’une autre prestigieuse et orgueilleuse grande école...) ? Et que la thermodynamique élémentaire soit bafouée par ceux-la même qui sont les mieux formés pour la faire appliquer ? Pourtant Sadi Carnot fut un de leurs plus brillants anciens à Polytechnique, et l’enseignement qu’on y reçoit aujourd’hui ne démérite pas : dans les applications qu’il donne de sa présentation unifiée de la thermodynamique, l’auteur d’un cours de physique statistique à cette école [14] prend soin de préciser : on pourrait économiser jusqu’à 90 % d’électricité en chauffant les maisons à l’aide de pompes à chaleur au lieu de radiateurs.
     Il est vrai que l’enseignement de la thermodynamique se décline invariablement selon un formalisme désincarné hérité de l’idéal mécaniste, aux antipodes de l’approche intuitive des "Réflexions"de Carnot qui ne contiennent aucune équation. De sorte qu’on peut être rompu à ce formalisme et avoir perdu de vue les principes fondateurs. Ceci au terme d’un cursus d’école, mais comment expliquer qu’en situation de hautes responsabilités, des individus bien doués et bien formés ne ressentent pas un tel principe fondamental comme ayant valeur "d’impératif catégorique" ? Au plan moral, en fonction de ses conséquences aux plans scientifique et technologique. Qu’adviendrait-il si une loi physique comme le deuxième principe de la thermodynamique figurait au code civil ? Et si les ressources naturelles épuisables étaient assimilées à des biens sociaux ?... On frémit à toutes ces questions, et on pense à celle qu’ont posée de nombreux physiciens à la fin de la deuxième guerre : peut-on continuer à faire de la physique nucléaire après Hiroshima ? En fonction des problèmes et des échéances qui s’annoncent, après les dérives massives que je viens d’évoquer et qui seront tôt ou tard jugées impardonnables, peut-on encore enseigner la thermodynamique sans s’inscrire dans une véritable "insurrection des savoirs", comme disait Foucault, face à l’arrogance des "savoirs mercantiles"?
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     Le rendement idéal théorique d’une machine thermique fonctionnant suivant le cycle de Carnot est nettement inférieur à 1. Ceci veut dire que lors du transfert spontané de la chaleur de la source chaude vers la source froide, nous ne pouvons en détourner à notre profit qu’une fraction sous forme d’énergie mécanique et électrique W.
     Le rendement réel des centrales thermiques se situe en général entre 30 et 40 % d’où la nécessité de fonctionner en cogénération pour tirer parti aussi de la chaleur Q2 que la machine doit obligatoirement évacuer à l’extérieur (source froide, dont nos locaux à chauffer font naturellement partie). 
     Le rendement global (électrique + thermique) peut alors être de 80 % pour une centrale à gaz ordinaire.
     L’ensemble du dispositif fonctionne aussi bien en sens inverse : cf. figure 2

Figure 1

     En lui fournissant l’énergie électrique (mécanique) W, la machine fait revenir la chaleur de la source froide (air extérieur, ou mieux nappe phréatique) vers la source chaude (locaux à chauffer).
     Le rendement (coefficient de performance) idéal théorique est alors nettement supérieur à 1. Pour maintenir une température intérieure de 20° C (T1=293 K) à partir de l’air extérieur à -10°C (T1-T2 = 30 K), la formule ci-dessus donne une valeur de l’ordre de 10, donc 1000 %... C’est le principe de la pompe à chaleur, qui permettrait d’économiser jusqu’à 90 % par rapport au chauffage électrique par radiateurs à résistances qui banalise une utilisation "dégradante" de l’électricité...
     Le coefficient de performance réel des pompes à chaleur est d’environ 3 à 4, c’est-à-dire qu’on obtient 3 à 4 fois plus de chaleur que d’électricité dépensée. Ceci par une technologie qui est la même que celle des réfrigérateurs, donc parfaitement disponible et maîtrisée.

Figure 2


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Références
1 Le tout-électrique, plaie des HLM ; Libération, 6-7/12/97, p. 4
2 Benjamin Dessus, Atlas des énergies pour un monde vivable, Syros, 1994
3 J.P. Schapira, L'actualité chimique, novembre 1984, p. 29-33
4 Clefs CEA, n° 5, avril 1987
5 Fondation Energies pour le monde, co-sponsorisée par EDF
6 S. Carnot, Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance, Paris, 1824
7 Informations Chimie, n° 368, mai 1995, p. 78
8 La Recherche, Décembre 1997, p. 17
9 Le Monde, 5 février 1997
10 Systèmes solaires, n° 119, p. 56
11 Manifeste des agents et des syndicalistes d'EDF-GDF, 1997
12 INESTENE, 1996
13 Rapport Souviron, 1994
14 Roger Balian, Du microscopique au macroscopique, Ellipses, 1977, p. 215
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