LES EMPLOIS DES ENERGIES RENOUVELABLES
Réseau "Sortir du Nucléaire"
Du vent, du bois, du soleil ...
Le contenu en emploi dans les énergies renouvelables (investissements et
fonctionnement induit) est de 3 à 10 fois plus important que les investissements réalisés dans les énergies fossiles ou le nucléaire.
    Certaines filières comme le bois ou le solaire, ont des impacts économiques très décentralisés et au plus près des utilisateurs et du monde rural. C'est donc un atout majeur pour une politique équilibrée de l'aménagement du territoire.
    Peu de travaux de recherche existent sur la pertinence économique des filières énergies renouvelables en France. De ce fait, ce sont d'autres pays de la Communauté Européenne que nous devons prendre comme référence.
    La Commission Européenne a publié un Livre Blanc qui fixe un objectif de 12 % d'énergies renouvelables dans le bilan énergétique européen. L'application du plan d'action proposé dans ce document pourrait aboutir à la création nette de 1,6 millions d'emplois en Europe (1). C'est à dire que le bilan entre pertes et gains en emploi serait largement positif même si on réorientait notre
politique énergétique.
Quelques exemples édifiants par filière :

Eolien: l'Allemagne a atteint une puissance installée de 2'000 MW en 1997, le Danemark 1'000 MW, l'Espagne 500 MW, la France... 18 MW seulement et prévoit au mieux 250 MW en 2005. À cette date, l'Allemagne vise entre 5 à 10'000 MW !
    L'industrie éolienne emploie déjà 10'000 personnes en Allemagne et 10'000 au Danemark. Ce petit pays a fabriqué en 1996, 1360 éoliennes d'une puissance moyenne de 550 kW dont 80 % pour l'exportation et un chiffre d'affaires de 3,5 milliards de francs.
    L'industrie de l'éolien a déjà créé 50'000 emplois en Europe, en quelques années de développement. Sa croissance annuelle a atteint 36% en Europe depuis 1995.
    La filière éolienne permet de créer de 15 à 19 emplois par MW de puissance installée (2). En France, le potentiel éolien - c'est à dire la puissance que l'on pourrait installer dans de bonnes conditions de fonctionnement - est de 42 500 MW (3), c'est le deuxième d'Europe après celui de la Grande-Bretagne.
L'éolien pourrait donc représenter plus de 600'000 emplois en France à lui seul - si ce potentiel était exploité.

Bois énergie: en Autriche, pays 7 fois plus petit que la France, plus de 25'000 chaudières bois ont été installées en 15 ans. En France, le plan bois énergie a permis en 3 ans, l'installation d'une cinquantaine de chaufferies !
    Un développement à l'autrichienne pour notre pays entraînerait un investissement de plus de 3 milliards de francs par an et 10'000 emplois induits chaque année avec, à terme, dans 10 ans, plus de 10'000 emplois dans la filière approvisionnement. La filière bois énergie compte déjà aujourd'hui 25'000 emplois, soit presque autant que GDF: 35'000 emplois.
    Le bois-énergie nécessite trois fois plus de main d'œuvre que les énergies concurrentes. Ils se répartissent entre les activités de collecte, de conditionnement, de transport et d'exploitation des chaufferies bois.
    Une chaufferie qui alimente 1000 logements en utilisant 5 000 tonnes de bois permet de créer 4 emplois durables à temps plein dans des entreprises régionales.
    Le retard français en matière d'énergies renouvelables est aussi préoccupant pour l'emploi. En effet, il risque de nous priver d'une partie des créations d'emploi. Les entreprises françaises n'ayant pas de marché national, elles ne peuvent pas développer leur savoir-faire et n'auront donc pas la possibilité de s'imposer sur les futurs marchés. Nous perdront ainsi une partie des emplois : mise au point des techniques et fabrication des appareils.

Solaire thermique: l'Autriche et l'Allemagne produisent chacun 150 à 200'000 m2 de capteurs solaires par an contre moins de 5000 m2 en France. Moins d'une maison neuve sur 1000 est équipée de capteurs solaires en France, contre 25 pour 100 en Styrie (Autriche).
    Un plan raisonnable pour le solaire thermique en France pourrait engendrer au bout de 5 ans, 2 milliards de francs d'investissements et 450'000 m2 installés annuellement, soit 10'000 emplois pour la filière (fabrication et pose).

Solaire photovoltaïque: le livre blanc de la Communauté européenne recommande d'atteindre en 2010 l'objectif de 500'000 toits solaires en Europe.
    L'Allemagne a réalisé un premier programme de 3'000 toits en 1993. Le Japon a annoncé en 1994 un programme de 70'000 toits solaires pour l'an 2000, déjà réalisé à plus de 50 %. Les États-Unis ont lancé un programme d'un million de toits solaires pour 2010.
    En France, grâce à l'association Hespul (anciennement Phébus), 60 installations étaient réalisées en 1996 et un programme de 150 nouvelles installations est en cours, cofinancées par l'Europe. Photowatt, fabricant de panneaux photovoltaïques et leader européen installé en Isère, est en pleine expansion : l'effectif de l'entreprise est passé de 100 personnes en 1995 à 400 pour fin 1998.
    Le chiffre d'affaire doublera entre 1997 et 1998.
    Un plan de 10'000 toits solaires par an induirait 5 milliards de francs d'investissements, soit 2'000 à 3'000 emplois, et permettrait de faire baisser fortement les coûts de ces installations qui restent encore trop chères pour le particulier.
    Au vu de son taux de croissance exceptionnel - 25% par an - le photovoltaïque pourrait, d'après la Commission Européenne (4), permettre la création de 453 000 emplois en Europe d'ici 2010.
    Une étude du pétrolier BP (5) indique qu'un investissement de 1,2 millions de dollars permet de créer un emploi dans l'exploitation pétrolière offshore alors que 190 000 dollars suffisent pour le photovoltaïque.

Micro-hydraulique: la filière représentait plus de 7'000 emplois. Elle en a perdu 2500 durant les 5 dernières années, essentiellement du à l'absence de développement en France. La micro-hydraulique est depuis quelques années systématiquement écartée par l'administration avec la complicité d'EDF. Plusieurs milliers d'installations seraient envisageables dans des conditions de respect total des contraintes environnementales (débit réservé, passe à poissons, intégration au site...).

    1.EWEA Policy briefing Notes, 1997. European Wind Energy Association, London.
    2.Selon les associations professionnelles européennes EWEA, AEBIOM, EPIA et ESIF.
    3." 10% of the world's electricity consumption from wind energy". BTM Consult ApS, 1998
    4.Photovoltaics in 2010. European Directorate General for Energy, 1996.
    5.Tim Bruton, BP solar et al, A study of the manufacture at 500 MW per annum of crystalline silicon photovoltaic modules. 14th European Photovoltaic Conférence, Barcelona July 1997.

Henri DUPASSIEUX,
Association savoyarde pour le développement des énergies renouvelables