VIII / Pour l’information et contre la désinformation
    Sous une bonne volonté apparente, l’auteur en cache soigneusement une qui est d'assimiler la complexité (difficilement explicable mais ô combien efficace) de phénomènes naturels «donc sans danger» et la complication (apparemment explicable mais... diablement inefficace!) de techniques qui ont elles-mêmes été mises au point entre un consensus plus ou moins résigné et un coup de force politico-institutionnel; confusion manifestée ici par exemple entre des mesures en curies pour l’énergie nucléaire et en Becquerels pour les autres (ce qui équivaut à un facteur... 3.7 10E10 !). On peut d’ailleurs aussi y voir des échelles de tableaux qui sont, soit linéaires, soit logarithmiques dans le même comparatif, selon le type d’énergie "étudiée" (p. 166).
    Ce paragraphe représente naturellement une part importante de la polémique "pro/antinucléaire", mais je ne peux pas ne pas citer ces "informations" farfelues:
- «en Occident, les centrales nucléaires sont construites dans des régions faiblement urbanisées» (comme la vallée du Rhône?!),
- celle-ci naturellement invérifiable, comme: «Einstein serait favorable à l’énergie nucléaire» ,
- «Fort heureusement, l’opinion publique qui attache une grande importance à la protection de la nature, évolue de manière de plus en plus favorable à l’énergie nucléaire à mesure que le temps passe et qu’on comprend mieux cette énergie et ses avantages pour la protection de l’environnement» (p. 165),
- et cette dernière "perle": «L’information doit tout dire, mais aussi relativiser la gravité de l’événement et toujours être... rassurante» (p. 177), l’angoisse (cette ‘’radiophobie’’) doit donc être canalisée...
    Cette part n’étant pas négligeable, l’auteur n’aurait-il pas dû aussi parler des réacteurs qui ne fonctionnent que pour l’exportation?: «La France exporte 20% de sa production nucléaire, autrement dit plus de 10 réacteurs tournent uniquement pour l’étranger (...). Ajoutez l’électricité nécessaire au fonctionnement même du nucléaire, soit environ 5 réacteurs pour le seul enrichissement de l’uranium (NdlR: sans compter l’unité exclusivement réservée au chauffage du sodium de Superphénix...), et vous constaterez que le nucléaire n’est pas uniquement dangereux mais inutile»[34]
    Autre fait caractérisant une désinformation certaine: il faut bien avoir à l’esprit qu’en ce qui concerne la France en particulier, aucun texte ne définit ce qu’est un déchet radioactif: ainsi, les trois catégories A, B et C, utilisées si fréquemment pour classer les différents déchets ne sont définies par aucun texte réglementaire... Au sujet de ces déchets et de la ‘’transparence’’ (mot qu’il utilise à foison), l’auteur a la prudence de ne pas dire un seul mot de l’ANDRA* qui, même si son ministère de tutelle est celui de l’environnement et clame à toute occasion son indépendance, garde l’adresse et le téléphone du... CEA!
    Toujours dans le même domaine, pourquoi l’auteur ne parle-t-il pas de cette fameuse ‘’indépendance nationale’’?: un document EDF de 1996 (source page "Web" d’EDF) compare pourtant les besoins en uranium de la France, 7000 tonnes, à sa propre production, 1028 tonnes, alors qu’elle n’en importait en 1973 qu’environ un tiers! A ce propos, il serait aussi bon de savoir que le premier réacteur 100% français (Chooz) n’a été mis en service qu’en 1996, soit environ 40 ans APRES les débuts du nucléaire en France!
    Par contre, il nous ‘’sert’’ plusieurs fois cette... miraculeuse propriété du rayonnement alpha: «une simple feuille de papier l’arrête» (p. 197); cette propriété, si elle est intéressante lorsque l’émetteur est à l’extérieur de notre corps devient redoutable lorsqu’il y pénètre puisqu’alors ce rayonnement perdra toute son énergie dans les cellules voisines...
    Je pense donc surtout que l’auteur ignore ou feint d’ignorer les multiples procédures dérogatives qui, il semble falloir le répéter, sont tirées du nucléaire militaire avec le secret comme corollaire...
    Je tiens aussi à signaler «l’astuce» énervante, voire hypocrite consistant à mettre en exergue de chacun des chapitres, des pensées indiscutablement vraies mais sans rapport avec le sujet, par exemple: «Le sage recherche avec beaucoup d’avidité les richesses naturelles»(Sénèque) au chapitre intitulé «Une centrale nucléaire n’est pas une bombe atomique»!

Annotation:
[34] Perline, op. cit. p. 101