V / «Le nucléaire comme réponse à l’effet de serre»
Commentaires:
    1) Le nucléaire, avec les doutes sur sa sécurité et ses déchets, cherche une nouvelle légitimité avec ce danger que font courir les combustibles fossiles; cependant le débat sur le recours ou non au nucléaire (par rapport à cet effet) est... négligeable d’un point de vue mondial, car même s’il produit 17% de l’électricité mondiale, il n’assure qu’environ 5% de l’énergie totale! Réaliser 10% d’économies sur les 90% que représentent les combustibles fossiles, ce qui est réalisable en une décennie, équivaut donc à une contribution double de celle du nucléaire au niveau mondial et à un coût moindre [24], sans compter que le secteur transport, avec les 2/3 du pétrole consommé et environ 40% des émissions de CO2 devient un enjeu autrement majeur.
    2) Il importe de bien distinguer les causes de l’effet de serre des causes de son accroissement
    3) Les gaz à effet de serre autres que le CO2 sont à présent responsables d’environ 50% de l’accroissement de son effet[25]
    4) Il reste encore aussi une très grande incertitude dans les échanges entre la biomasse, l’atmosphère et les océans...
    5) Des changements de climat d’une amplitude probablement plus marquée pourraient venir du déboisement des forêts tropicales
    6) Vouloir remplacer une large part de la consommation future mondiale par l’énergie nucléaire, tel qu’il est souvent proposé dans des publications sur l’effet de serre qui se veulent alarmistes, relève de l’utopie: remplacer les centrales au charbon par des nucléaires, ce qui permettrait d’économiser 370 Mtep et qui ferait baisser l’effet de serre de 3.4% nécessiterait la construction de centaines de tranches nucléaires de 1000 MW et demanderait un investissement inimaginable (au moins 3000 milliards de FF pour 300 centrales), sans rien compter d’autre tels le coût du stockage des déchets, les usines d’enrichissement et... le démantèlement des centrales (voir paragraphe économique)!
    7) Je ne ferai aussi qu’esquisser une réponse à l’affirmation... incantatoire comme quoi le nucléaire permettrait à la (toujours seule?!) France d’être une des nations les moins polluantes du monde: pour économiser du capital, EDF a "oublié" de dépolluer ses centrales au charbon; comme elles fonctionnent plus souvent que prévu pour faire face à la demande de chauffage électrique (tiens, à ce propos l’auteur a... oublié lui aussi d’en parler; aussi pour ne pas risquer d’être taxé "d’empêcheur de... chauffer en rond", ne dirai-je rien non plus de cette aberration économique...) et aux "révisions" des réacteurs, les émissions de SO2 par kWh produit par toutes les centrales françaises sont deux fois plus fortes qu’en Allemagne qui dépend fortement de ses centrales à charbon, mais qui a investi énormément dans leur dépollution durant les années 70 - 80, pendant que la France décidait (mais a-t-on demandé à la population?!) d’accélérer son programme nucléaire et non pas démarrait, comme "on" nous le martèle également, pour nous faire croire qu’il n’était que la conséquence de la "crise" pétrolière, alors qu’il avait déjà commencé la sienne..."propre", particulièrement aux USA...
    8) Enfin, il est intéressant de relever une affirmation d’EDF: «Quadrupler la capacité de production électronucléaire mondiale (soit 25 fois 40 réacteurs par an!) nous apparaît raisonnablement réalisable sur une période de un quart de siècle (...) et le rythme de construction devrait se stabiliser à environ 100 tranches de 1000 MW lancées chaque année dans le monde »[26]. Ce n’est pas une ‘’relance’’ du programme nucléaire, c’est une... explosion (serait-ce cela qu’on appelle une... excursion?!), (...) mais le plus étonnant est que cette proposition est en total décalage avec les discussions réelles: à notre connaissance, dans aucun des cercles internationaux où se discutent les problèmes du climat et de l’énergie (IPCC, AIE, OCDE, CEE, PNUE*,...), un tel scénario n’est discuté ni même évoqué [27].

Annotations:
[24] L’auteur veut (faire) ignorer l’autoconsommation qui représente 7 à 8% de la consommation nationale soit 5 réacteurs de 900 MW...
[25] EPA*, 1989; voir aussi OCDE*, Energy Technologies for Reducing Emissions of Greenhouse Gases, Paris, 1989)
[26] Christian Stoffaës, président du comité de la prospective, «Energie nucléaire, économie, écologie », in Commissariat général du Plan, L’économie face à l’écologie, La Découverte/La Documentation française, Paris, 1993, p. 234, source Hervé Kempf, op. cit., p. 142
[27] Hervé Kempf, ibid. p. 146