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Leclanché déclenche la cellule Graetzel
Greatcell Solar a un an pour mettre sur le marché la cellule solaire révolutionnaire.
    En 1993, lorsque l'EPFL attribue à Leclanché une licence pour commercialiser la cellule photoélectrique révolutionnaire du professeur Graetzel, le climat est à l'euphorie. La découverte, c'est certain, va bouleverser rapidement le marché photovoltaïque. En utilisant un colorant pour recueillir les rayons lumineux, à la place du silicium des cellules traditionnelles, les coûts de fabrication devraient diminuer drastiquement. C'était en 1993. En six ans, Leclanché a parcouru une bonne partie du chemin qui va du laboratoire à la chaîne de production. Cet été, l'entreprise yverdonnoise s'est lancée dans l'ultime ligne droite: elle a créé une filiale, Greatcell Solar SA, pour chapeauter les dernières études et commercialiser ses cellules.
    Installé à Yverdon depuis quelques semaines, Francis Thiébaud, le nouveau directeur du développement de Greatcell Solar, exhibe volontiers un prototype développé par Leclanché. Un appareil de la taille d'une plaque de chocolat, muni d'un écran LCD, destiné à afficher les prix aux rayons des grandes surfaces. En apparence, le gadget n'a rien de bien particulier. Mais le petit capteur qui l'alimente encourant électrique, bien qu'il ressemble à s'y méprendre à ceux qui équipent nos calculettes, est composé de cellules à colorant. Dans ce genre d'applications, elles ont un avantage de taille sur leurs concurrentes au silicium: elles fonctionnent bien mieux à faible luminosité et en lumière rasante. Greatcell Solar vise tout particulièrement ce marché des applications d'intérieur et de faible puissance.

Le compagnon idéal
    Le second produit d'avenir que développe le fabricant de batteries, un condensateur à haute capacité, pourrait devenir le compagnon idéal de la cellule. Enjouant le rôle de tampon, il prendrait le relais lorsque celle-ci ne serait plus éclairée. Un système complet d'alimentation électrique qui deviendrait la spécialité Greatcell Solar.
    Autant d'idées que Didier Bonnard, patron de Leclanché, tient à étudier de très près: «Nous nous donnons un an pour nous assurer que les débouchés sont réels, et pour affiner notre produit. Si la réponse est positive, nous nous lançons. »Une décision formelle interviendra dans le courant de l'année prochaine, et l'appareil de production et de commercialisation serait opérationnel début 2002.
    Michael Graetzel, l'inventeur, se dit heureux de la démarche de Leclanché. Il n'en cache pas moins une certaine impatience devant la prudence de l'industriel. «Il me semble que le marché est là. Les analyses du capital-risque vont dans ce sens. Faut-il vraiment faire de nouvelles études?» Didier Bonnard justifie sa démarche par le souci de préserver les 350 emplois de Leclanché. «Pour démarrer la production, précise-t-il, il faudra investir entre cinq et quinze millions de francs. Une somme que Leclanché ne peut pas risquer. Cette année, nous sortons enfin de cinq années difficiles. » La création d'une filiale sera aussi garante de souplesse lorsqu'il faudra trouver du financement. «Il sera possible d'ouvrir le capital de Greatcell Solar à des investissements extérieurs sans toucher à Leclanché.» La formule a le mérite de permettre l'innovation sans menacer l'acquis.

Recherche foisonnante
Plus de 100 groupes de recherche travaillent sur la cellule à colorant dans le monde. Trois exemples suisses.
Solaronix
La petite entreprise d'Aubonne vit entièrement de la cellule Graetzel. Entre autres recherches, elle développe une "cellule à colorant du futur", à produire en rouleaux.
Asulab
Le laboratoire de recherche de Swatch Group a mis au point un verre de montre capteur d'énergie. Seul défaut: le verre est encore légèrement teinté.
Kurth Glas und Spiegel
Le patron de cette verrerie soleuroise, Martin Kurth, a modifié ses machines, et espère commencer la fabrication de capteurs pour le bâtiment en janvier déjà!

Jean-Luc Vonnez
L’HEBDO 11 novembre1999, p.71

Dossier Graetzel