Depuis environ vingt ans le cycle du combustible
nucléaire a été marqué par une évolution
considérable tant au niveau des procédés industriels
que de la radioprotection.
I - LES ENJEUX
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· l’incendie · la dissémination radioactive · la criticité (matières fissiles) · l’exposition externe · l’exposition interne Le risque d’incendie constitue une préoccupation sur le plan radiologique car il peut conduire à une dissémination radioactive. D’autres circonstances peuvent aussi être à l’origine d’une dispersion accidentelle plus ou moins importante de matières radioactives : défaut du système de ventilation, fuite d’un circuit, mauvaise manipulation par un opérateur,…etc. La protection du personnel et de l’environnement contre les risques de cette nature est un impératif essentiel à prendre en compte dès la conception de l’installation et tout au long de son exploitation. Les solutions techniques de prévention mises en oeuvre doivent être adaptées aux risques encourus. Dans le cas de l’uranium naturel, seules certaines parties d’une usine de fabrication du combustible comportent des équipements parfaitement étanches (par exemple ceux mettant en oeuvre l’UF6). Pour le reste, la prévention du risque de dissémination repose sur la ventilation des installations et le "capotage" de certains équipements. La ventilation est réalisée de manière à établir des gradients de pression entre le procédé, le laboratoire et l’environnement et à filtrer les contaminants atmosphériques libérés en situation normale ou accidentelle. Enfin, le port d’un masque respiratoire est obligatoire pour certaines opérations. Concernant le plutonium, le confinement total des matières radioactives est indispensable. Il est assuré par la mise en place d’une succession de barrières physiques (boîtes à gants, cellules et bâtiment) et d’un système de ventilation (confinement dynamique). L’architecture de toute installation est conçue selon un principe de sectorisation tant pour le confinement que pour l’incendie (isolement en cascade des différents réseaux de ventilation, depuis la boîte à gant jusqu’à la sortie du bâtiment). Des réseaux de détection sont mis en place à différents niveaux pour contrôler en "temps réel" l’efficacité des barrières de confinement. La contamination éventuelle des agents et des matériels aux postes de travail est également contrôlée à la sortie des locaux et des bâtiments (contrôleurs d’extrémités, des vêtements, des matériels). Les atmosphères de travail ainsi que l’environnement proche sont contrôlés par des prélèvements journaliers ou hebdomadaires (filtres) et des moniteurs de contamination. Ces derniers doivent délivrer une alarme le plus rapidement possible en cas de présence anormale de radionucléides artificiels. La précocité de l’alarme dépend d’une part de la position du moniteur et d’autre part de sa limite de détection. Nous reviendrons plus loin sur les études menées à l’IPSN sur les problèmes de transfert de l’aérocontamination dans les installations [1]. Concernant l’uranium de retraitement, le retour d’expérience est encore insuffisant pour pouvoir fixer définitivement les conditions d’exploitation. Le risque d’exposition interne étant plus élevé que pour l’uranium naturel, des dispositions plus drastiques devront certainement être prises (ventilation, étanchéité des équipements, port du masque). Le risque d’accident de criticité constitue une préoccupation importante dans les installations où sont manipulées des matières fissiles. La prévention du risque de criticité a eu un impact considérable sur la conception des ateliers et usines. Les stockages de matières fissiles sont conçus selon une géométrie sûre. La gestion rigoureuse des matières fissiles dans les installations et enfin le dimensionnement au séisme des bâtiments concernés permettent de minimiser le risque d’excursion critique en fonctionnement normal. Néanmoins, l’éventualité d’un accident ne peut pas être complètement écartée; elle justifie la mise en place d’une dosimétrie de criticité dans les installations à risque et la poursuite des programmes de recherche dans ce domaine. p.19
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L’évaluation de l’exposition
des individus en cas d’accident de criticité constitue précisément
l’un des axes de travail poursuivi par le Service de Dosimétrie
l’IPSN (SDOS). La problématique est de disposer de moyens dosimétriques
adaptés à la mesure de fortes doses et forts débits
de dose en champs mixtes (neutrons, gamma). Nous
ne reviendrons pas ici sur les travaux du SDOS dans ce domaine, ceux-ci
ayant déjà été présentés le 10
septembre 1993 au Comité scientifique de l’IPSN lors de l’évaluation
de son programme de recherche en dosimétrie des neutrons [2].
Nous soulignerons cependant les difficultés rencontrées aujourd’hui
sur le plan opérationnel en matière de dosimétrie
de criticité. En effet, aucun des centres nucléaires confrontés
au risque de criticité ne pourrait faire face complètement
aux besoins importants à mettre en oeuvre pour réaliser la
dosimétrie individuelle et d’ambiance à la suite d’une accident
(en particulier l’exploitation des détecteurs à activation
représente un travail relativement lourd). L’exercice
"en grandeur réelle" réalisé le 15 mars 1994 pour
évaluer la capacité d’entraide des différents centres
a montré globalement la faisabilité de cette entraide mais
aussi les insuffisances qui demeurent en moyens et/ou en compétence
dans certains laboratoires ayant participé à l’exercice [3].
Parmi les recommandations tirées de cette expérience, on retiendra notamment la poursuite des travaux en cours au SDOS pour étalonner sur fantôme les appareils de radioprotection destinés au tri du personnel par la mesure du sodium 24. L’exposition externe dans les installations du cycle peut résulter de 2 composantes de rayonnements dans des proportions variables selon les lieux : les rayonnements photoniques (gamma et X) et les neutrons issus de la fission spontanée, des réactions (a,n) et des fissions provoquées par les réactions précédentes. L’exposition externe dans les ateliers de fabrication du combustible d’uranium est liée à la présence de ses différents isotopes (U-235, U-238 et U-234) et aux produits de décroissance associés. Comme mentionné précédemment, l’uranium de retraitement contient en plus l’isotope 232 qui contribue au débit d’exposition externe. Aucune disposition particulière de prévention n’est nécessaire, en dehors d’une classification en zones surveillées ou contrôlées. Les problèmes d’irradiation se posent essentiellement pour la manipulation du combustible Pu irradié, celui-ci ne contenant plus seulement l’isotope 239, mais également d’autres isotopes en proportions variables selon le type de réacteur et le taux de combustion. Le "Pu irradié" est enrichi en Pu-240, Pu-241 et Pu-242, mais aussi en Pu-236 et Pu-238 (cas des filières à U enrichi). La présence des isotopes 238, 240 et 242 entraîne une augmentation de l’irradiation neutronique et celle des isotopes 236, 238 et 241, une augmentation de l’irradiation gamma en particulier par les descendants du Pu-241 (Am-241 en U-237). Le débit de dose externe varie en fonction de la composition isotopique du combustible et de la forme chimique du Pu, la présence d’éléments légers favorisant les réactions (a, n). Par ailleurs, le spectre de rayonnement aux postes de travail varie aussi fortement en fonction des protections biologiques mises en place. La dosimétrie individuelle est représentative de l’exposition globale (film poitrine). En revanche, l’exposition des mains peut poser problème à certains postes de travail, comme les postes de manipulation et de chargement des pastilles dans les gaines ou encore au contrôle des assemblages. Selon les stades du cycle, les opérations sont plus ou moins automatisées et n’impliquent normalement la présence de personnel que de façon limitée en nombre et en temps. Les interventions doivent être effectuées dans des conditions bien spécifiques (accessibilité, visibilité, fiabilité et maintenabilité des équipements). Le dimensionnement des protections biologiques fait l’objet d’études poussées d’optimisation. Lors de la conception des ateliers, des scénarios d’exploitation avec des fréquences et des durées réalistes des interventions sont élaborés. Les calculs prévisionnels des débits d’équivalents de dose, pour chaque source, avec les protections prévues permettent théoriquement d’optimiser la protection des travailleurs. Les niveaux d’exposition externe auxquels le personnel est soumis sont généralement faibles dans les ateliers (de l’ordre du mSv/an). La limite réglementaire des 50 mSv/an en vigueur et même celle des 20 mSv/an en projet sur la base des recommandations de la CIPR 60 ne sont que très exceptionnellement atteintes. (suite)
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Les problèmes de dosimétrie qui peuvent se poser sont le plus souvent d’ordre métrologique : la difficulté de la mesure dans des champs de rayonnements complexes (champs mixtes n, g, rayonnements faiblement pénétrants) est régulièrement mise en évidence par l’obtention de résultats incohérents (facteur 2 ou plus) entre les dosimètres réglementaires (films) et les dosimètres "opérationnels" (détecteurs de type électronique). La réponse des systèmes dosimétriques est imparfaite et, lorsque leur étalonnage n’est pas correct ou lorsque leur utilisation n’est pas faite dans des conditions nominales, la fiabilité des mesures peut être fortement affectée. La dosimétrie des neutrons, notamment dans certains ateliers manipulant des matières fissiles, est loin d’être satisfaisante. Les efforts de recherche sur de nouveaux capteurs dosimétriques et les procédures d’étalonnage associées sont nécessaires dans un contexte réglementaire de plus en plus exigeant (on rappelle encore à ce sujet l’évaluation par le Comité Scientifique du programme de recherche en dosimétrie des neutrons du SDOS). L’exposition interne constitue en fait le risque majeur pour les travailleurs des ateliers et usines. Trois voies d’incorporation sont possibles : · l’inhalation · l’ingestion · la blessure La voie principale d’incorporation des radionucléides est l’inhalation de composés sous forme d’aérosols présents dans l’atmosphère. L’arbre respiratoire constitue un organe cible pour le plutonium et les isotopes de l’uranium mais aussi la première étape de sa distribution dans l’organisme (principalement le foie et le squelette pour le plutonium, les reins et le squelette pour l’uranium). L’incorporation par ingestion, bien qu’envisageable, reste peu probable en milieu professionnel et ne donne lieu qu’à une faible diffusion systémique. Enfin, la contamination par transfert cutané à la suite d’une blessure est plus rare que l’inhalation accidentelle (environ 1 cas sur 5) mais elle a des conséquences sanitaires généralement plus sérieuses. L’expérience montre en effet que les quantités incorporées sont souvent plus importantes et difficiles à évaluer lors d’une blessure et qu’une fraction de l’activité passe rapidement dans le sang au niveau de la plaie. La problématique de la radioprotection est : · d’assurer la surveillance des travailleurs exposés aux composés radiotoxiques (exposition chronique du personnel en l’absence de confinement et exposition accidentelle dans les installations confinées); · d’évaluer l’incorporation et la dose engagée en cas d’accident et de disposer d’un traitement efficace pour éliminer les radiocontaminants. La dosimétrie des travailleurs exposés au risque de contamination interne repose, d’une part sur les mesures effectuées aux postes de travail (prélèvements d’air individuels et d’ambiance) et d’autre part sur les mesures individuelles effectuées lors des examens médicaux (analyses sur les excréta et mesures anthropodiamétriques). L’interprétation des mesures fait appel au modèle biocinétique adapté au mode d’incorporation et au radionucléide considéré [4]. Les mesures de la contamination interne par les actinides chez l’individu et l’interprétation conduisant au calcul de dose sont extrêmement délicates du fait que les limites annuelles d’incorporation (LAI) sont basses et que : - la mesure directe des isotopes du Pu et de l’uranium piégés dans l’organisme pour une contamination se situant au niveau de la LAI est difficile (manque de sensibilité des systèmes de spectrométrie in vivo), - les données d’excrétion sont difficiles à interpréter car elles font appel à des modèles métaboliques complexes et malgré tout approximatifs et du fait que les quantités éliminées par excrétion sont très faibles, surtout pour les composés insolubles. A ces difficultés s’ajoute le fait qu’un travailleur d’un atelier de fabrication de combustible est souvent exposé à des produits de composition et de forme physico-chimique variables au cours du temps (soit parce qu’il change de poste de travail, soit parce que les composés de base ont changé). On comprend la difficulté d’interpréter un résultat d’analyse anthroporadiamétrique ou radiotoxicologique, quand ce qui a été mesuré à un moment donné peut être le résultat de l’intégration de plusieurs mois ou de plusieurs années de contamination dans des condition variables. p.20
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Le calcul des doses engagées
à la suite d’une incorporation chronique ou accidentelle dépend,
au plan, biocinétique, d’une part de modèles anatomophysiologiques
généraux (modèle respiratoire, modèle digestif,
modèle cutané), d’autre part de modèles de rétention
propres aux composés. Les incertitudes relatives aux calculs des
doses efficaces engagées sont liées aux valeurs des paramètres
appliquées à ces modèles et aux coefficients de risque
attribués aux organes cibles. Les valeurs de référence
sont basées sur des résultats expérimentaux et, quand
elles existent, sur des observations humaines.
Dans le cas notamment de l’incorporation par inhalation, une approche basée sur une connaissance plus précise des caractéristiques des composés industriels auxquels sont exposés les travailleurs est préférable, tant ces caractéristiques conditionnent le comportement biocinétique du radiocontaminant. La meilleure technique de prévention est le confinement. Mais cette technique à l’échelle de toute une usine représente, pour l’exploitant, un coût important qui doit être mis en perspective avec les bénéfices escomptés. Les questions qui se posent en terme d’analyse coût-bénéfice sont alors les suivantes : quels procédés doivent être mis en atmosphère confinée ? quand le port du masque doit-il être recommandé (imposé)? Dans tous les cas, quels protocoles de surveillance faut-il raisonnablement mettre en oeuvre pour assurer le respect de la réglementation ? Dans un contexte réglementaire en évolution, compte tenu des enjeux économiques et des contraintes de travail, la réponse à ces questions doit être apportée avec prudence et au cas par cas. I.3 - Évolution des recommandations
de la Commission Internationale de Protection Radiologique
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Basés sur ce modèle, de nouveaux facteurs de dose par pour les travailleurs ont été calculés et publiés par la CIPR (Publication 68, 1994). La Publication 68 remplace et annule la Publication 61 qui aura constitué une publication intérimaire. La révision complète de la Publication 30 se poursuit pour prendre en compte de nouvelles données expérimentales recueillies sur les principaux radionucléides. En particulier, les données relatives à l’uranium et au plutonium ont été très soigneusement revues et seront prochainement publiées. Les modèles d’excrétion sont également revus pour la surveillance. cliquer sur l'image pour taille MAXI Tableau 1 - Évolution des LAI (Bq) calculées pour l’inhalation de 235U et 239Pu Indépendamment de tous ces changements dus aux progrès des connaissances scientifiques, une évolution capitale de la dosimétrie interne est intervenue avec le concept de LAI spécifique. Les recommandations de la CIPR stipulent que la LAI soit basée sur une dose efficace engagée de 20 mSv. La LAI (Bq) pour n’importe quel radionucléide peut être obtenue en divisant la limite de dose efficace moyenne annuelle (0,02 Sv) par le facteur de dose par unité d’incorporation, DPUI (Sv/Bq) : Notons que l’essentiel des recommandations de la publication 68 de la CIPR a été incorporé dans les nouveaux "Basic Safety Standards" [5] et qu’il sera repris dans la future Directive Européenne. Bien entendu, les doses dues à l’exposition interne et celles dues à l’exposition externe doivent toujours être sommées conformément aux exigences réglementaires. II - MAÎTRISE DE LA CONTAMINATION INTERNE
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- quels outils resteront du domaine
des experts et comment se fera l’articulation recherche/opérationnel
?
II . 1 Études pour la radioprotection
II . 2 - Transferts de contamination dans
les installations
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L’efficacité du confinement dynamique des enceintes ventilées doit être évaluée afin de mettre en évidence d’éventuels risques de rétrodiffusion de la contamination lors d’ouvertures de ces enceintes. Les transferts de contamination aux postes de travail peuvent être évalués par : - la caractérisation globale de la ventilation du local afin d’estimer l’homogénéité du renouvellement d’air dans ce local et de mettre en évidence d’éventuelles "zones mortes"; - la caractérisation des transferts de contamination entre les postes de travail et les détecteurs associés, afin de déterminer les temps et les coefficients de transfert(3) jusqu’au différents détecteurs de la contamination. Les techniques de traçage gazeux (He, SD6) et particulaire (aérosols fluorescents) peuvent être utilisées pour optimiser la ventilation et définir au mieux l’emplacement des détecteurs d’ambiance. A ces techniques expérimentales peuvent être associés des codes de calcul de mécanique des fluides tels que TRIO pour simuler différentes configurations des mouvements de l’air dans un local ou étudier la sensibilité à des paramètres. Ces études des transferts de la contamination peuvent être complétées par des analyses fines de la distribution granulométrique des aérosols grâce à des appareils de type impacteurs en cascade qui couvrent le spectre en dimension des particules inhalables. II . 3 - Programme de recherche en dosimétrie
interne
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Tableau 2 - Éléments d’une mise en place de la radioprotection opérationnelle
Les objectifs poursuivis sont
:
· acquérir les données indispensables sur les caractéristiques physico-chimiques et biocinétiques des composés radiotoxiques rencontrés aux postes de travail, · effectuer les évaluations dosimétriques et l’ interprétation des résultats de la surveillance individuelle en rapport avec les données de la surveillance dans les ateliers, · améliorer les moyens de traitement de la contamination interne. Les résultats acquis dans le cadre du programme de recherche DOSINTER devraient permettre d’améliorer les connaissances en dosimétrie interne mais aussi de nourrir l’expertise nécessaire au contrôle de la surveillance mise en place par les industriels. Analyse des actinides (Pu et URE)
* analyse de surveillance spéciale : urines de 24 heures avec
ajout d’un traceur (242Pu)
Néanmoins, s’il y avait une incorporation
chronique de Pu correspondant à la LAI, cette contamination serait
détectable à partir des analyses d’urine, après des
périodes d’incorporation de quelques mois (pour les composés
moyennement transférables) ou de quelques années (pour les
composés peu transférables). Ainsi, la surveillance basée
sur les analyses d’urine est utile pour l’estimation à long terme
de contaminations cumulées.
Anthroporadiamétrie pulmonaire
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Plutonium : les mesures in vivo sont utiles avant tout lorsqu’elles sont effectuées rapidement après l’incorporation suspectée ou connue. Elles requièrent un système anthroporadiamétrique avec une résolution suffisante dans la bande 10-30 keV pour mesurer les raies UX-L accompagnant la désintégration du Plutonium-239. Aucun système n’est aujourd’hui suffisamment performant pour la mesure des rayonnements fortement atténués par les tissus thoraciques. L’alternative consiste donc à mesurer l’américium-241 généralement présent avec le Pu (l’efficacité de détection de la raie 60 keV de l’américium permet en effet une limite de détection inférieure à 10 Bq). L’estimation du Pu à des niveaux inférieurs à la LAI est donc possible dans le cas où le rapport des deux radionucléides dans les composés inhalés est bien connu et où leur comportement biocinétique n’est pas significativement différent. Même avec les systèmes les plus performants et les plus lourds à manipuler, les mesures directes de la rétention du Pu dans le poumon ne sont actuellement pas réalistes en surveillance de routine pour des incorporations inférieures à la LAI (avec les détecteurs germanium de haute pureté, la limite de détection est d’environ 3000 Bq). URE : avec la mise en oeuvre de l’uranium issu du retraitement et réenrichi se pose le problème de la détection de l’uranium 234 en anthroporadiamétrie. Cet isotope est essentiellement un émetteur a avec une raie g à 53 keV difficilement détectable in vivo en raison de son très faible rapport d’émission g/a. L’alternative qui consiste, pour l’uranium naturel, à évaluer la teneur en U-234 à partir de celle de l’U-235 n’est plus possible dans le cas de l’URE, les teneurs des 2 isotopes n’étant plus liées a priori. A la difficulté de détecter les raies de faible énergie s’ajoutent les limites des systèmes imposées par la surface et le manque de souplesse des détecteurs de type germanium nécessitant un système de refroidissement. Les investigations en cours au SDOS montrent qu’une nouvelle génération de détecteurs silicium fonctionnant à température ambiante permettrait d’abaisser les limites de détection d’un facteur 2 à 3 environ (100 Bq), soit à des valeurs inférieures à la nouvelle LAI pour le Pu peu transférable (voir tableau 1). Un projet de développement d’un tel système a été initié par le SDOS dans le cadre d’une collaboration entre l’IPSN et le fabricant CANBERRA. L’étude de faisabilité actuellement en cours devrait permettre d’évaluer l’intérêt de détecteurs silicium pour l’anthroporadiamétrie pulmonaire. Pour autant, les progrès technologiques escomptés ne résoudront pas tous les problèmes de la mesure de la contamination du plutonium in vivo et en particulier les incertitudes du résultat liées à l’étalonnage (variation de l’anatomie d’un individu à l’autre, hétérogénéité de la contamination au niveau du poumon) et à l’interprétation basée sur des fonctions de rétention imparfaites. Parallèlement aux recherches sur les détecteurs, les efforts doivent par conséquent porter sur l’optimisation du protocole de la mesure et son interprétation en fonction des différents paramètres relatifs à l’individu et aux composés incorporés. Le bilan des difficultés inhérentes à la mesure directe et aux analyse d’excrétion permet de prévoir que la recherche devra s’orienter vers la mise au point de meilleurs protocoles associant les deux approches. Le plus souvent, les deux types de mesure resteront complémentaires mais, pour des questions économiques et selon les circonstances, l’une des techniques pourra être privilégiée. Parallèlement, on assure la cohérence entre les modèles de rétention et les modèles d’excrétion. Ceci est particulièrement important pour les composés peu transférables de Pu et d’URE qui posent le plus de problèmes. Les calculs de dose
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Ce modèle permet l’application
au calcul correspondant à une incorporation unique (utile pour une
évaluation dosimétrique en cas d’accident) ou chronique (exposition
des travailleurs dans les ateliers non confinés).
D’autres logiciels sont également utiles aux médecins du travail pour faciliter la gestion de la surveillance des travailleurs. Ce type de logiciel doit permettre d’évaluer l’incorporation des radionucléides à partir des examens médicaux de routine (mesure "organisme entier", "poumon", examen urinaire ou fécal), ou à partir d’examens spéciaux, effectués notamment à la suite d’un incident connu dans la zone de travail ou encore à la suite d’un examen de routine ayant mis en évidence une activité anormale. En cas de doute quant à la classe de solubilité du composé, celle-ci doit pouvoir être estimée au mieux en comparant les résultats de mesure à la courbe théorique de décroissance de l’activité établie pour chacune des 3 classes de solubilité. Aucun logiciel de ce type n’existe de façon satisfaisant à ce jour et des efforts restent nécessaires pour leur mise au point. Études de radiotoxicologie appliquées
Études du traitement de la contamination
interne
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Plutonium : Le traitement privilégié
pour la décorporation, en dehors du lavage pulmonaire qui ne doit
être utilisé qu’en cas de contamination sévère
par inhalation, reste l’administration de DTPA ( DiéthylènetriaminePentaacétique
Acide). L’efficacité de cette molécule est reconnue pour
réduire la charge corporelle en plutonium (facteur 10 environ).
Néanmoins, le DTPA ne s’applique pas dans tous les cas et certaines
formes physico-chimiques du Pu échappent à son action. Il
est contre-indiqué en présence d’uranium, ce qui pose le
problème de la contamination par des mélanges d’oxydes :
aucun traitement n’existe à ce jour pour le MOX.
CONCLUSION Dans les installations du cycle du combustible
nucléaire, les risques pour les travailleurs sont variables d’un
poste à un autre et sont évolutifs avec le temps en fonction
su type de combustible, des techniques mises en jeu ou même des équipes.
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1 LAI = Limite Annuelle d’Incorporation
retour au texte 3 le coefficient de transfert entre un point M quelconque et la source de contamination est définie par : q: débit de polluant à la source retour au texte 4 ICP-MS : Spectrométrie de masse couplée à une torche à plasma retour au texte RÉFÉRENCES [1] D.Boulaud et J.C. Laborde,
Transfert
de contamination aux postes de travail. In : La protection des travailleurs
dans les ateliers de fabrication du combustible nucléaire . Rapport
IPSN / 93-01 (1992)
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Biological assessment of occupational exposure to actinides. Proceedings of a Workshop held at Versailles, France, May 30 - June 2, 1988 Radiat . Prot. Dosim., vol. 26, N° 1-4, 1989. Intakes of radionuclides - Detection, assessment and limitation of occupational exposure. Proceedings of a Workshop held at Bath, UK, Sept. 1993. Radiat. Prot. Dosim., vol.53, N° 1-4, 1994. Traitement de la contamination interne accidentelle des travailleurs. IPSN Editeur ISBN 2-950 8497-0-9 (1995). Publications de la CIPR INTERNATIONAL COMMISSION ON RADIOLOGICAL PROTECTION (ICRP). Limits for Intakes of Racionuclides by Workers. (ICRP Publication 30) Oxford Pergamon press, 1979 INTERNATIONAL COMMISSION ON RADIOLOGICAL PROTECTION (ICRP). Annual Limits on Intake of Radionuclides by Workers Based on the 1990 Recommendations. (ICRP Publication 61) Oxford Pergamon, 1991. INTERNATIONAL COMMISSION ON RADIOLOGICAL PROTECTION (ICRP). Human Respiratory Tract Model for Radiological Protection. (ICRP Publication 66) Oxford, Elsevier Science Ltd., 1994. INTERNATIONAL COMMISSION ON RADIOLOGICAL PROTECTION (ICRP) . Dose Coefficients for Intakes of Radionuclides by Workers. (ICRP Publication 68) Oxford, Elsevier Science Ltd.,1994. p.25
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